par Eva Taylor
FRANCFORT (Reuters) - Les prêts aux ménages et aux entreprises de la zone euro ont diminué pour le 28e mois consécutif en août, comme pour illustrer la nécessité pour la Banque centrale européenne (BCE) de poursuivre ses efforts pour relancer le crédit.
Ces prêts ont reculé de 1,5% en rythme annuel après une baisse de 1,6% en juillet, montrent les statistiques publiées jeudi par la BCE.
Même si la baisse s'est légèrement atténuée, elle demeure l'une des principales préoccupations de l'institut d'émission.
L'économie de la zone euro a calé au deuxième trimestre et l'inflation se situe depuis près d'un an sous 1%, dans ce que le président de la BCE, Mario Draghi, appelle la "zone dangereuse".
La BCE a déjà réagi à cette situation en baissant à nouveau ses taux directeurs, déjà à des niveaux très bas et même négatif pour l'un d'entre eux. Elle a également lancé un nouveau programme de prêts à long terme très bon marché pour les banques (TLTRO), dans l'espoir de les voir injecter cet argent dans l'économie réelle en aidant en priorité les petites et moyennes entreprises.
Ces mesures, complétées par un projet de programme de rachats de titres adossés à des actifs (ABS) et d'obligations sécurisées, pourraient se révéler insuffisantes, suggèrent les statistiques publiées jeudi.
DRAGHI INQUIET POUR LA REPRISE
"Il reste à voir à quel point toutes les mesures annoncées par la BCE pour augmenter les liquidités encourageront les banques à prêter davantage", explique Howard Archer, économiste à IHS Global Insight.
"Reste à voir aussi à quel point la demande de crédit de la part des entreprises augmentera avec des perspectives économiques et politiques aussi incertaines", ajoute-t-il.
Conscient du problème, Mario Draghi a déclaré, dans une interview publiée jeudi par le quotidien lituanien Verslo Zinios, que la faiblesse prolongée du crédit risquait de compromettre la reprise économique dans la zone euro.
"Au vu des informations préliminaires reçues au cours de l'été, la situation économique a été quelque peu plus faible qu'attendu", a-t-il dit. "Nous prévoyons toutefois une croissance modeste au second semestre de l'année."
Les banques de la zone euro ont restreint leurs prêts en raison notamment d'une régulation bancaire les contraignant à renforcer leurs ratios de fonds propres. Quand aux entreprises, qui se tournent davantage vers les banques que vers les marchés pour se financer, surtout celles de taille modeste, elles hésitent à investir en raison d'un climat économique troublé.
La masse monétaire M3, mesure large des liquidités en circulation dans l'économie de la zone euro, a augmenté de 2,0% en rythme annuel le mois dernier, a précisé la BCE jeudi, une progression conforme au consensus établi par Reuters.
La BCE ne peut qu'espérer que cet afflux de liquidités encouragera les banques à prêter et les entreprises à investir, un phénomène qui tarde à se dessiner, comme en attestent les derniers chiffres des prêts au secteur privé.
(Patrick Vignal pour le service français, édité par Marc Angrand)