Le gouvernement Berlusconi a adopté vendredi un nouveau plan de rigueur draconien de 45,5 milliards d'euros sur deux ans, dans l'espoir de mettre un terme aux attaques spéculatives contre l'Italie, rattrapée par la crise de la dette dans la zone euro.
Les nouvelles mesures, qui s'ajoutent à une cure d'austérité de 48 milliards d'euros sur trois ans adoptée à la mi-juillet par le Parlement, permettront de récupérer "20 milliards en 2012 et 25,5 milliards en 2013", a déclaré Silvio Berlusconi devant la presse.
Le Premier ministre italien s'est dit "affligé" de devoir imposer de tels sacrifices à son pays, mais satisfait" car le texte -- un décret-loi qui devra être ratifié dans 60 jours par le Parlement -- a été adopté "à l'unanimité du conseil des ministres".
Le plan répond, a-t-il souligné, aux demandes des partenaires européens et de la Banque centrale européenne qui a conditionné le soutien à Rome par le biais de rachat d'obligations d'Etat à l'adoption de nouvelles mesures de rigueur. La BCE a énuméré ses conditions dans une lettre "secrète".
"Après s'être concentrée sur la Grèce, la spéculation était en train de viser l'Italie" qui doit renouveler pour 250 milliards d'euros d'emprunts publics cette année, s'est justifié M. Berlusconi.
Grande nouveauté, le Cavaliere, 74 ans, a annoncé une "taxe de solidarité" sur deux ans pour les revenus les plus élevés (5% pour ceux supérieurs à 90.000 euros par an, 10% au-dessus de 150.000).
"Mon coeur saigne alors que le gouvernement se vantait de ne jamais avoir mis la main à la poche des Italiens", a-t-il soupiré, en qualifiant ces mesures d'"inévitables".
Selon les commentateurs, son allié clé de la Ligue du Nord l'a convaincu qu'il fallait trouver un équilibre entre les sacrifices demandés aux plus riches et à la classe moyenne.
En butte à des attaques spéculatives, l'Italie, qui ploie sous une énorme dette (plus de 1.900 milliards d'euros, 120% du PIB), s'était engagée vendredi dernier à revenir à l'équilibre budgétaire dès 2013 au lieu de 2014. Le plan de rigueur a été mis au point en seulement sept jours, a fait remarquer le ministre de l'Economie, Giulio Tremonti.
M. Berlusconi a souligné vouloir réduire "les coûts de la politique", allusion à une demande pressante de l'opinion publique, furieuse des privilèges de "la caste" comme est désormais surnommée la classe politique. La taxation des revenus parlementaires sera par exemple sensiblement accrue.
Rome prévoit aussi d'éliminer les provinces les moins habitées (moins de 300.000 habitants) et de fusionner les communes de moins de 1.000 habitants. Selon le gouvernement, plus de 50.000 postes d'élus locaux seront supprimés.
Les ministères devront aussi se serrer la ceinture et économiser 8,5 milliards sur deux ans.
Les transferts aux collectivités locales seront amputés de 9,5 milliards d'euros, ce qui a provoqué une levée de boucliers des élus qui ont qualifié le plan de rigueur "d'inique et de dépressif" pour la croissance car il les obligera à augmenter les impôts locaux.
Le plan de rigueur suit aussi les recommandations de la BCE sur la libéralisation de l'économie, la privatisation des sociétés municipales et l'assouplissement du droit du travail (licenciements, recours aux contrats à durée déterminée).
Le gouvernement a en outre annoncé un renforcement de la lutte contre l'évasion fiscale, la hausse de la taxation des gains financiers (de 12,5% à 20%) et le transfert des jours fériés au lundi pour accroître la productivité. L'âge de la retraite pour les femmes du secteur privé devrait augmenter progressivement à 65 ans à partir de 2016 au lieu de 2020 prévu initialement.
Pour Fabio Fois, analyste de Barclays Capital, le plan va "dans la bonne direction" mais les mesures "risquent d'avoir un effet négatif sur la consommation en ralentissant la croissance l'an prochain" et il faudrait "des réformes structurelles pour augmenter la croissance potentielle et offrir plus de garanties pour le remboursement de la dette à long terme."
L'Italie connaît une croissance poussive d'un maximum de 1% par an depuis une décennie.