L'affolement des marchés est dû à une conjonction de facteurs macro-économiques qui déboussolent les investisseurs et créent un climat de panique faisant fortement chuter les Bourses mondiales. Tour d'horizon.
LA DETTE COLOSSALE DES ETATS-UNIS, DONT LA NOTE A ETE ABAISSEE
La première économie du monde a une dette faramineuse de 14.300 milliards de dollars et un déficit annuel de 1.600 milliards.
Son président Barack Obama n'a réussi à arracher qu'in extremis un accord avec ses adversaires républicains, le 2 août, pour éviter un défaut de paiement et donc la faillite du pays.
Mais ce compromis a été jugé insuffisant par l'agence de notation Standard and Poor's en raison notamment des concessions aux républicains, opposés à toute hausse d'impôts. S&P a donc dégradé vendredi 5 août la note des Etats-Unis, jusqu'alors jugé emprunteur de première classe (AAA). Cette sanction, une première dans l'histoire du pays, a fait dévisser les Bourses mondiales lundi alors qu'elles avaient déjà fortement baissé la semaine précédente.
Paradoxalement, les investisseurs restent confiants dans les capacités des Etats-Unis à honorer leurs dettes: les emprunts américains sont toujours très prisés et leurs taux n'ont pas grimpé.
APRES LA GRECE ET LE PORTUGAL, L'ENDETTEMENT DE L'ITALIE ET DE L'ESPAGNE
Depuis plusieurs semaines, les marchés sont tourmentés par la crainte d'une contagion de la crise grecque à l'Italie et à l'Espagne, lourdement endettées, et qui représentent à elles deux 30% du PIB européen. Par conséquent, les taux auxquels ces deux pays empruntent sur le marché de la dette ont atteint des records.
Leurs inquiétudes sont nourries par "le compromis illisible du sommet européen du 21 juillet destiné à sauver la Grèce et l'euro", selon l'économiste Elie Cohen.
Ce sommet a pourtant signé une avancée majeure: le fonds de secours de la zone euro pourra racheter des obligations de pays en difficulté à ses créanciers. Mais cette nouvelle compétence ne pourra entrer en vigueur avant la rentrée car il doit être entériné par les Parlements nationaux. Surtout, ce fonds a aujourd'hui une capacité de prêt effective de 440 milliards d'euros, largement insuffisante pour sauver un pays comme l'Italie ou l'Espagne.
UNE REPONSE POLITIQUE JUGEE INSATISFAISANTE
A un peu plus d'un an de l'élection présidentielle américaine, les démocrates et républicains se sont déchirés sur la question de la dette, et depuis, les querelles partisanes ont repris, avant même la création de la commission parlementaire censée mettre en oeuvre la réduction de la dette.
"Le débat entre démocrates et républicains a été ubuesque. Les républicains sont quasiment prêts à valider, à espérer une récession pour pouvoir gagner les élections", accuse le gérant d'actions Renaud Murail, de Barclays Bourse. "C'est ce risque de récession qui a douché les marchés".
Dans la zone euro, ce sont les désaccords avec l'Allemagne sur le sauvetage de la Grèce, et le manque de concertation, qui inquiètent.
Plus généralement, les marchés surréagissent alors même que le processus politique est lent par nature.
LA PEUR D'UNE RECESSION
Les gouvernements occidentaux se sont engagés à d'importants programmes de rigueur budgétaire pour résorber leur dette. "C'est un cercle vicieux (...) du coup ils baissent les dépenses qui soutenaient l'activité et l'emploi, et donc la croissance ne repart pas", explique Elie Cohen.
A cela s'ajoute que la croissance prévue en début d'année n'est pas aussi bonne que prévu, et que les prévisions vont prochainement être abaissées.
Dans ce contexte, "le marché anticipe une récession", notamment aux Etats-Unis, selon M. Murail. D'autres estiment plus réaliste de tabler sur un "ralentissement" car l'Inde et la Chine continueront à doper la croissance mondiale.
LES PERSPECTIVES DES ENTREPRISES REVISEES A LA BAISSE
Même si les résultats du premier semestre ont été plutôt bons, les grands groupes mondiaux sont d'une extrême prudence pour la seconde moitié de l'année.
"Les grandes entreprises industrielles exportatrices notamment allemandes et les groupes de matières premières sont en train de revoir leurs perspectives à la baisse", en prenant en compte le risque d'une récession, selon M. Cohen. Par ricochet, leurs actions baissent en Bourse.