Les régulateurs des marchés américains, la SEC et la CFTC, ont mis en cause vendredi un algorithme de ventes, processus informatique complexe permettant une vente massive en quelques minutes, pour expliquer le "krach éclair" qui a ébranlé Wall Street le 6 mai.
"L'une des leçons essentielles de l'événement est que face à un marché nerveux, l'exécution automatique d'un important ordre de vente peut provoquer des mouvements de ventes extrêmes", relèvent la Securities Exchange Commission et la Commodity Futures Trading Commission dans leur rapport expliquant comment le Dow Jones a pu chuter ce jour-là de plusieurs centaines de points en quelques minutes.
"Le 6 mai a été dès le début une journée exceptionnellement turbulente pour les marchés" en raison de la crise de la dette en Europe, expliquent les régulateurs.
Dans ce contexte, à 14H32 (18H32 GMT) face à "une volatilité inhabituellement élevée et une réduction des liquidités", un courtier a lancé un programme de ventes portant sur 75.000 contrats à terme sur l'indice S&P 500, selon le rapport. Les contrats sur un indice boursier sont destinés à parier sur son évolution future.
Pour cela, ce courtier a choisi un programme informatique complexe, un algorithme, qui a effectué la vente en seulement 20 minutes, une durée très réduite pour un volume si important (représentant plus de quatre milliards de dollars).
La société de ce courtier avait déjà réalisé ce genre d'opérations, mais sur une période beaucoup plus longue de cinq heures, précise le rapport.
Le document n'identifie pas la société de courtage concernée mais selon la presse financière, il s'agirait du gestionnaire d'actifs Waddell & Reed Financial. Le texte n'évoque pas de poursuite à son encontre.
"La meilleure façon de décrire ce qui a suivi, ce sont deux crises de liquidités": une sur le marché de ces contrats à termes, appelés les E-Mini, l'autre sur le marché boursier, intervenue à 14H45, expliquent ensuite les régulateurs.
Les opérateurs, préoccupés par l'effet de cette vente massive et rapide sur l'indice S&P 500, se sont retirés du marché. Faute d'acheteur, leurs ventes automatiques se sont traduites par une vertigineuse chute des cours.
Le Dow Jones, qui reculait de plus de 2%, a alors brutalement plongé de presque 10%. Il s'était redressé quelques minutes plus tard.
Cette mise en cause d'un programme informatique devrait apporter de l'eau au moulin des régulateurs, qui n'ont cessé de mettre en cause le rôle excessif joué sur les marchés par les techniques de spéculations extrêmement sophistiquées des professionnels, qui découragent les petits porteurs.
Ils ne présentent cependant aucune nouvelle proposition concrète.
"Une autre leçon du 6 mai, c'est que beaucoup d'acteurs du marché emploient leurs propres méthodes de pause dans les échanges --totalement ou sur des produits financiers en particulier-- en se basant sur des signaux différents envoyés par les marchés", note le rapport.
Dans les jours suivant, l'événement avait été expliqué en grande partie par la multiplication des différentes plates-formes d'échanges. Quand le New York Stock Exchange avait suspendu les échanges de certains titres, leur prix avait chuté sur les plates-formes alternatives, qui continuaient, elles, d'opérer.
La SEC a depuis mis en place des systèmes de "coupe-circuit", qui suspendent la cotation des actions quand elles chutent de plus de 10%.
Interrogés par des journalistes, des responsables de la SEC et de la CFTC réunis pour une conférence se sont abstenus de tout commentaire sur la responsabilité du courtier auteur de la transaction.
Un représentant de la CFTC a néanmoins reconnu qu'il s'agissait d'un "choix malencontreux".
Le CME, la Bourse de Chicago où s'échangent les E-Mini, a de son côté estimé qu'elle était "à la fois légitime et cohérente avec les pratiques du marché".