Nicolas Sarkozy et Angela Merkel s'entretiendront à nouveau samedi soir à Bruxelles à la veille du sommet européen pour préparer une "réponse globale et ambitieuse" à la crise de la zone euro dont les éléments seront adoptés lors d'un second sommet au plus tard mercredi, ont-ils annoncé dans un communiqué commun publié par l'Elysée.
Dans ce texte, Paris et Berlin ont également demandé que des "négociations immédiates" s'engagent avec le secteur privé "pour trouver un accord permettant de renforcer la soutenabilité" de la dette grecque.
Les nuages s'accumulent sur le sommet européen de dimanche, annoncé pourtant urbi et orbi comme celui du sauvetage tant attendu de la zone euro, et de la Grèce où l'austérité a encore mobilisé jeudi des milliers de manifestants, parfois avec violence
A tel point que la presse allemande a évoqué son report, tant les divergences seraient encore fortes entre Européens, appelés pourtant à trouver une solution "décisive" pour éviter le "déclin et le néant", selon l'avertissement lancé par le Premier ministre français François Fillon.
"Le sommet aura lieu dimanche", a toutefois assuré un responsable européen, sous couvert d'anonymat. Inquiet, le Premier ministre grec Georges Papandréou a mis en garde jeudi soir contre une absence de décisions au sommet de dimanche. La solution "décisive" tant promise risque pourtant de se faire attendre.
La zone euro devrait annoncer dimanche des décisions de principe sur la réponse à la crise de la dette mais pas d'accord finalisé car de nombreux éléments "techniques" resteront à régler, a ainsi averti un diplomate de haut rang. Au risque de décevoir encore un peu plus des marchés déjà très fébriles.
L'annonce d'un report possible du sommet a ainsi fait l'effet d'une bombe. Les bourses européennes ont décroché, terminant toutes les dans le rouge avec Milan enregistrant la plus forte baisse (-3,78%). Paris et Francfort ont chuté de leur côté de près de 2,5%.
Le climat s'est encore assombri en fin d'après-midi après l'annonce du décès d'un homme de cinquante ans à la suite de violents incidents ayant émaillé la manifestation anti-austérité à laquelle il participait à Athènes avec des dizaines de milliers d'autres grecs. Une bataille rangée a opposé dans l'après-midi des manifestants communistes et une masse de jeunes vêtus de noir devant le luxueux hôtel de Grande-Bretagne en contrebas du parlement. Des combats au corps à corps et à coups de barres de bois et de fer ont opposé les deux camps, qui ont fait au moins 16 blessés.
Ces violences se sont déroulées à l'occasion d'un nouveau rassemblement monstre dans les rues d'Athènes, au deuxième jour d'une grève générale contre la nouvelle loi de rigueur.
Ce nouveau tour de vis devait être voté jeudi au Parlement pour diminuer le déficit abyssal du pays et lui éviter la faillite. Son adoption gèlerait les conventions collectives et aboutirait à un abaissement brutal du niveau de vie des Grecs, surtout des fonctionnaires.
Le gouvernement du Premier ministre Georges Papandreou cherche coûte que coûte à prouver sa bonne foi et la détermination de son pays face à ses partenaires européens, appelés une nouvelle fois à sauver la Grèce et au-delà l'ensemble de la zone euro, en proie à la plus grave crise de son histoire.
Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a appelé de ce point de vue les Européens au "compromis" pour aboutir à des décisions "résolues" et "immédiates" dimanche.
Mais l'accord, qui semblait pourtant se profiler en début de semaine, a été bruquement remis en cause par d'ultimes divergences. Les Européens restent divisés sur les modalités permettant de renforcer les moyens d'intervention du Fonds de soutien aux pays de la zone euro en difficulté (FESF), sans mettre à nouveau à contribution les budgets des Etats.
Sur ce point, "il n'y a pas de proposition commune" européenne pour le moment, a reconnu jeudi le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble. Or, il s'agit d'un instrument-clé pour enrayer la crise de la dette dans la zone euro et empêcher qu'elle n'emporte l'Italie ou l'Espagne.
Doté aujourd'hui d'une capacité effective de prêts de 440 milliards d'euros, le FESF ne dispose pas d'une enveloppe suffisante pour faire face à une contagion de très grande ampleur et recapitaliser les banques en difficulté.
D'où l'idée en discussion depuis des semaines d'augmenter sa force de frappe en démultipliant sa capacité d'intervention via un effet de levier, sans nouvelle garantie des Etats. C'est ce dernier point qui bloque, selon des diplomates.
M. Schäuble a toutefois précisé qu'il y avait "un accord total" entre la France et l'Allemagne sur les mesures à prendre pour résoudre la crise. L'impasse est à mettre au compte de différends subsistant avec d'autres pays européens, a-t-il laissé entendre. Les députés allemands, qui ont adopté le FESF dans sa forme actuelle fin septembre dans la douleur, sont pourtant sceptiques vis-à-vis des débats en cours sur un effet de levier. La commission du Budget du Bundestag, qui a demandé jeudi à M. Schäuble de lui fournir des explications, devra voter sur toute modification de l'instrument européen.
Une réunion de hauts fonctionnaires de l'Union monétaire, au sein d'un forum appelé l'"Euro working group", était en cours jeudi en fin d'après-midi à Bruxelles pour tenter de tenter de trouver un compromis.
Des réunions préparatoires au sommet des ministres européens des Finances sont aussi programmées vendredi et samedi à Bruxelles.