Banco Popular, cinquième banque espagnole, a obtenu lundi le soutien de la majorité des actionnaires de Banco Pastor à son offre de rachat, une nouvelle étape de transformation du secteur espagnol, en plein débat sur la recapitalisation des banques européennes.
"Les actionnaires de référence de Banco Pastor, la fondation Pedro Barrié de la Maza avec 42,17%, Amancio Ortega (propriétaire d'Inditex, maison mère de Zara, ndlr) avec 5,06%, et Financière Tesalia avec 5,04%, ont accepté les termes de l'offre", a annoncé Banco Popular.
La somme des trois participations garantit presque le succès de l'opération, puisque Banco Popular voulait rallier au moins 50,1% du capital. Mais elle a ajouté lundi une autre condition: avoir plus de 75% des droits de vote.
Banco Popular, qui compte boucler le rachat début 2012, avait dévoilé ses intentions vendredi, précisant avoir entamé des discussions.
Les titres des deux groupes, suspendus vendredi après-midi à la Bourse de Madrid, ont repris leur cotation lundi matin. Banco Pastor a clôturé en bond de 21,05% à 3,68 euros et Popular a pris 0,98% à 3,6 euros.
L'offre, via un échange d'actions, valorise Banco Pastor à 1,362 milliard d'euros, soit une prime de 35,7% sur le cours de clôture jeudi.
Tandis que Banco Popular est la cinquième banque espagnole par la capitalisation (4,99 milliards d'euros), Banco Pastor, dont le siège est en Galice (nord-ouest), est beaucoup plus modeste.
C'est surtout l'une des cinq entités espagnoles (et la seule banque, face à quatre caisses d'épargne) recalées en juillet aux tests bancaires européens.
Selon une source proche du dossier, elle a cherché dès l'été un partenaire pour la reprendre, suscitant notamment l'intérêt de Banco Sabadell.
"Il était très improbable que Banco Pastor puisse survivre, en raison de sa forte exposition au secteur immobilier et de son taux élevé de créances douteuses qui en découle, mais aussi de sa faible base de capital et sa dimension réduite", estimaient lundi les analystes de Bankinter.
"Pour Pastor, (cette offre) signifie sortir d'une situation délicate pour aller vers une situation un peu plus normale", renchérit Fernando Hernandez, de la maison de courtage Inversis.
Mais du côté de Popular, "même s'ils gagnent des parts de marché (en rachetant Pastor), ils introduisent aussi plus de risque dans leur bilan avec l'immobilier".
Banco Popular a d'ailleurs annoncé qu'elle pourrait procéder à une émission d'obligations convertibles d'un montant "de l'ordre de 700 millions d'euros" pour maintenir son niveau de solvabilité à 9,8% et va réaliser des provisions pour 1,108 milliard.
L'agence de notation Moody's a elle estimé que la nouvelle entité aurait "un profil de crédit plus faible" que celui de Banco Popular et a annoncé lundi qu'elle envisageait d'abaisser sa note de A2.
Mais "l'opération générera des synergies de 800 millions d'euros", a souligné le président de Banco Popular Angel Ron lors d'une conférence de presse.
"De cette manière, deux banques moyennes fusionnent", commente Daniel Pingarron, analyste d'IG Markets, "et parmi les banques moyennes espagnoles, ce processus de concentration était logique, de la même façon que cela s'est passé pour les caisses d'épargne".
L'ensemble du secteur bancaire espagnol, ébranlé par l'éclatement de la bulle immobilière fin 2008, a été soumis ces deux dernières années à un vaste processus de restructuration, avec de nombreuses fusions de caisses d'épargne, passées de 45 à 15, et un effort de recapitalisation pour rendre les entités plus solvables.
Tandis qu'"il est possible que Santander acquière finalement la Cam", Caja Mediterraneo, mise sous tutelle de la Banque d'Espagne, "le seul acteur (de taille moyenne) qui reste seul est maintenant Banco de Valencia", note M. Pingarron.
"Il est probable qu'il y ait plus de processus de concentrations, mais cela va se faire lentement", note M. Hernandez, soulignant que "Bankinter est une option intéressante.
Les analystes rappellent surtout que ce mouvement s'inscrit dans le cadre du bouleversement actuel du secteur bancaire européen.
"Cela fait beaucoup de mesures prises dans le secteur financier en peu de jours", note M. Hernandez: "bizarrement, ce week-end, nous avons eu l'accord entre Sarkozy et Merkel de recapitalisation du secteur financier européen, le sauvetage de Dexia par la France et la Belgique, et l'annonce de rachat par Banco Popular de Banco Pastor".