L'Italie a cherché mercredi à rassurer des marchés paniqués par la tempête en zone euro, en accélérant l'adoption des mesures économiques réclamées par l'Union européenne et le départ de Silvio Berlusconi d'ici à samedi ou dimanche.
La Chambre des députés a décidé de donner son feu vert définitif samedi ou au plus tard dimanche, au lendemain d'un vote prévu au Sénat.
La Bourse de Milan a malgré tout clôturé sur une chute de 3,78% tandis que les taux obligataires planaient au-delà des 7%, un record insoutenable sur le long terme.
Pour tenter d'apaiser les esprits, le président italien Giorgio Napolitano a aussi souligné que les réformes devant réduire la dette italienne et stimuler la croissance seront adoptées "d'ici quelques jours".
Juste après, M. Berlusconi démissionnera comme il s'y est engagé mardi soir, a répété M. Napolitano, laissant entendre que cela pourrait donc intervenir dès samedi ou dimanche.
Des experts s'inquiétaient que l'Italie ne retombe dans ses vieux travers: pourparlers à l'infini pour former un gouvernement alors que la zone euro est en pleine tempête avec des marchés de plus en plus inquiets de sa capacité à rembourser son énorme dette de 1.900 milliards d'euros.
M. Napolitano a souligné qu'il entendait mener "immédiatement et avec la plus grande rapidité les consultations pour donner une solution à la crise de gouvernement". La Constitution qui en fait le maître du jeu politique prévoit qu'il consulte tous les partis siégeant au Parlement.
Le président a rappelé qu'il avait deux options possibles: former un nouveau gouvernement "capable d'obtenir la confiance du parlement" ou, à défaut, "dissoudre le parlement pour donner immédiatement le coup d'envoi d'une campagne électorale qui se déroulera dans des délais les plus brefs possibles".
Conscient de l'urgence, M. Napolitano a souhaité "un changement dans les comportements politiques" y compris en brisant "de vieux tabous", des propos interprétés comme un appel à un gouvernement d'union nationale.
L'ex-commissaire européen Mario Monti est devenu le favori pour succéder à M. Berlusconi après sa nomination mercredi soir comme sénateur à vie par le président Napolitano. Personnalité au-dessus des partis, il pourrait être soutenu par une ample majorité parlementaire. Les investisseurs sont favorables à une telle hypothèse.
Les principales confédérations du patronat italien, réunissant aussi bien les entreprises que les banques et les assurances, ont également réclamé "un gouvernement +d'urgence nationale+ avec une large base parlementaire", se disant "très préoccupés" en raison de la situation économique du pays.
Le chef de l'Etat peut aussi tenter la piste d'un nouveau gouvernement de centre-droit élargi aux centristes et dirigé par exemple par le bras droit de M. Berlusconi, Gianni Letta. Mais s'il ne parvient pas à former une majorité, des élections devront être organisées dans un délai de 70 jours.
Plusieurs parlementaires influents du PDL de M. Berlusconi se sont dits opposés à un retour aux urnes avant le terme normal de 2013. "Je suis totalement contre des élections anticipées", a indiqué à des journalistes Beppe Pisanu, qui fédère 20 à 30 de ses collègues pour la plupart d'ex-démocrates-chrétiens.
A l'inverse, le Cavaliere s'est dit partisan d'élections dès janvier ou février, affirmant au journal La Stampa, qu'il ne serait plus candidat mais soutiendrait son dauphin, Angelino Alfano, secrétaire général du PDL.
Etrangement mercredi, aucun journal italien ne parlait de "fin de règne" ni de "chute" du Cavaliere qui détient le record de longévité de l'après-guerre: près de 10 ans au total depuis 1994.
James Waltson, professeur de relations internationales à l'Université américaine de Rome, a expliqué sa chute par "une mauvaise gestion de l'économie combinée à ses problèmes personnels", estimant que "s'il avait su faire marcher l'économie, il aurait probablement gardé son poste".
La cote de popularité du magnat charismatique est tombée en octobre à 22%, son plus bas historique, affectée par une série de scandales sexuels et des accusations de corruption qui ont touché la garde rapprochée de M. Berlusconi.
"J'espère qu'après lui nous aurons quelqu'un avec un peu plus de cerveau, capable de résoudre nos problèmes. Ca fait des années qu'il est en politique et il n'a pas fait grand chose", a déploré Giuseppe, un retraité interviewé par l'AFP-TV à Rome.
Un éditorialiste du journal La Stampa s'amusait mercredi à imaginer une Italie "sans B.", souhaitant qu'elle soit "un peu grise et barbante", fasse "un régime sans blagues et vulgarités" et devienne "une démocratie saine et contente d'elle-même".