Le Premier ministre François Fillon a assuré mercredi qu'il ne "renoncerait jamais" à la lutte contre le déficit public, mais son ministre du Budget Eric Woerth a reconnu que la France ne pourrait le ramener sous le seuil des 3% du PIB d'ici 2012, comme promis à Bruxelles.
Après un pic à 7 - 7,5% du produit intérieur brut (PIB) cette année et l'an prochain sous l'impact de la crise et des dépenses de relance, le déficit public de la France (Etat, sécurité sociale et collectivités locales) serait de 6% à 6,5% en 2011, puis de 5% à 5,5% en 2012, selon les dernières prévisions inscrites dans un document publié par le ministère du Budget.
"Dans la mesure des informations qui sont disponibles actuellement", le retour du déficit à 3% du PIB, limite autorisée par le Pacte de stabilité européen, "n'est donc pas atteignable sans un rebond extrêmement fort de la croissance", a reconnu mercredi Eric Woerth, auditionné par la commission des Finances de l'Assemblée nationale.
Le scénario du ministère repose sur l'"hypothèse prudente" d'une croissance de 2,5% en 2011 et 2012, après seulement 0,5% l'an prochain.
En raison de la crise, la Commission européenne a donné à la France un répit de près de trois ans, jusqu'en 2012, pour ramener son déficit public sous le seuil de 3%. Faute de quoi elle s'expose à des sanctions.
"La lutte contre les déficits, c'est un objectif auquel je ne renoncerai jamais", avait martelé peu auparavant François Fillon à l'Assemblée nationale.
Lors de la prise de fonction du Premier ministre en 2007, l'objectif du gouvernement était de ramener le déficit à 0% du PIB en 2010. Puis il a été reculé à 2012, avant d'être reporté sine die en raison de la crise.
"Nous continuerons à lutter contre les déficits structurels. Le budget de 2010 (...) sera pour la troisième fois un budget de stricte reconduction des dépenses et nous continuerons à réduire le nombre des emplois publics", a lancé M. Fillon.
Conformément à la règle de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, 33.754 postes de fonctionnaires devraient ainsi être supprimés en 2010, dont 16.000 dans la seule Education nationale.
Selon le document du ministère, publié en vue du prochain débat d'orientation budgétaire pour 2010, les dépenses de l'Etat progresseront de 1,2%, comme l'inflation prévue l'an prochain.
"Si les déficits se creusent, c'est bien uniquement en raison de la crise" qui pèse sur les recettes de l'Etat et le contraint à augmenter la dépense pour soutenir la relance, a argumenté Eric Woerth lors de son audition, réaffirmant son attachement au Pacte de stabilité européen.
Selon Bercy, l'Etat pourrait subir cette année un manque à gagner total de 36 à 44 milliards d'euros par rapport à 2008, ce qui ramènerait ses recettes au niveau de 1998.
L'envolée du déficit, financé en grande partie par l'endettement, va également gonfler la dette publique de la France, désormais attendue à 77% du PIB en 2009, puis 88% en 2012.
De nouvelles prévisions qui ne tiennent pas compte de "l'emprunt national" annoncé lundi par le président Sarkozy, dont le montant n'est pas encore connu, ni des sommes prêtées aux banques par l'Etat pour les soutenir dans la crise.