La Suisse a décidé d'intensifier sa lutte contre l'argent étranger non-déclaré placé dans ses banques, qui empoisonne ses relations avec ses voisins et partenaires économiques.
La fraude fiscale des étrangers plaçant leur argent en Suisse est devenue un sujet majeur des autorités suisses, accusées par les pays d'origine de ces fraudeurs d'être trop peu regardantes sur les fonds déposés dans ses banques, et notamment s'ils ont été déclarés ou non dans leur pays d'origine.
Désireuse de redorer son image, la Suisse a décidé en conséquence d'intensifier sa lutte contre l'argent non-déclaré placé dans ses banques, qui empoisonne ses relations avec ses voisins et partenaires économiques.
Dans un communiqué publié vendredi, le gouvernement suisse indique vouloir "intensifier sa lutte contre les abus visant à blanchir de l'argent ou à frauder le fisc" et présente un programme d'action comportant deux volets.
D'une part, dans le cadre des recommandations révisées du GAFI (groupe d'action financière contre le blanchiment d'argent), la Suisse a décidé de considérer les "graves infractions fiscales", comme des "infractions préalables au blanchiment d'argent".
Cette disposition est une nouveauté dans le droit suisse, selon une source proche du dossier, et a été longtemps combattue par les banquiers suisses, qui se sont aujourd'hui résignés à l'accepter.
D'autre part, les banques et les intermédiaires financiers devront mettre au point un code basé sur un certain nombre de critères leur permettant d'établir si l'argent apporté par leurs clients est déclaré ou non. En cas de soupçons, la banque ou les intermédiaires doivent le signaler aux autorités.
Le programme suisse annoncé vendredi écarte l'idée d'autodéclaration fiscale du client, proposée par des partis de gauche en Suisse pour lutter contre l'argent non-déclaré.
Le gouvernement estime que la mise en place d'une telle autodéclaration est difficile, et préfère une autorégulation des banques elles-mêmes, un système qui a déjà fait ses preuves dans le cas du blanchiment d'argent.
Enfin, un groupe d'experts indépendant, présidé par M. Aymon Brunetti, a été mis en place. Ce groupe d'experts est chargé de développer la stratégie de la Suisse en matière de marchés financiers et de soumettre des propositions.
L'Association suisse des banquiers (ASB) s'est déclarée globalement satisfaite de ce programme d'action.
Dans un communiqué, l'ASB se félicite notamment que le gouvernement suisse ait rejeté l'idée d'une "autodéclaration obligatoire systématique", car c'est un système qui "jette un soupçon généralisé sur la clientèle", qui "n’est ni applicable ni crédible". "Aucune banque au monde ne saurait être tenue pour responsable de la conformité fiscale de ses clients", relève l'ASB.
De son côté, l'UDC (droite populiste), le premier parti politique suisse, salue l'autorégulation mise en place par les banques. "Il est juste de miser d'abord sur l'autorégulation de la branche financière", indique l'UDC.
Pour sa part, le parti socialiste suisse a regretté qu'il n'y ait pas d'autodéclaration obligatoire des clients. Selon la conseillère nationale (député) socialiste Susanne Mleutenegger-Oberholzer, c'est le lobby des banquiers qui a conduit à la solution annoncée vendredi qu'elle a qualifiée de "pas vraiment intelligente".
La Suisse essaye depuis des mois de régler le problème des fonds non déclarés déposés dans ses banques. Elle a mis au point un accord cadre, qui permet de régulariser ces fonds, en les taxant lourdement, mais en garantissant aussi l'anonymat de leurs détenteurs.
La Suisse a présenté cet accord-cadre à ses principaux pays partenaires, dans le cadre de discussions bilatérales.
A ce jour, deux pays ont signé et ratifié cet accord, la Grande-Bretagne et l'Autriche.
L'Allemagne l'avait signé elle aussi, mais cette semaine, les parlementaires allemands ont définitivement refusé de ratifier cet accord, ce qui constitue un sérieux revers pour la Suisse.
Des négociations bilatérales sont aussi en cours avec l'Italie et la Grèce.