Le Club Méditerranée a déclaré jeudi la guerre à Bernard Tapie en portant plainte pour "diffusion d'informations trompeuses" et "manipulation de cours", alors que ses pertes se sont encore alourdies au premier semestre sous l'effet de la crise.
Les déclarations fracassantes de l'homme d'affaires, aux aguets pour entrer au capital de la marque emblématique, sont "inacceptables", a lancé le PDG du Club Med, Henri Giscard d'Estaing, lors de la présentation des comptes dans un cinéma parisien.
L'ancien ministre, qui entretient depuis plusieurs semaines le flou sur son éventuelle entrée dans le capital du Club Med, a multiplié les attaques à l'encontre de la stratégie du groupe et critiqué vertement son PDG.
Parallèlement, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête "depuis plusieurs semaines" sur l'évolution de l'action. Elle avait été saisie le 11 mai par le Club Med, excédé par des "propos contradictoires" de Bernard Tapie ayant fait bouger le titre.
L'action s'était envolée le 27 avril de 6,31% à 12,55 euros, après des informations de presse dévoilant l'intérêt de l'homme d'affaires pour le groupe.
Depuis, l'action est retombée en-dessous des 10 euros, et le titre a clôturé jeudi en baisse de 3,98% à 9,18 euros à la Bourse de Paris, le marché s'inquiétant du retard des réservations pour l'été.
Dégradés sous l'effet de la crise, les comptes n'ont réservé guère de surprise: une perte nette semestrielle doublée à 22 millions d'euros, des réservations pour l'été en retard de 18,3% et un chiffre d'affaires en berne (-4,2% à 724 millions d'euros).
Toutefois, l'indicateur de la rentabilité des villages a grimpé de 7,7% à 28 millions d'euros, signe que la stratégie de montée en gamme entamée en 2004 porte ses fruits, selon le groupe.
Pour faire face à la crise, le Club Med a réduit la voilure sur l'été, en réduisant ses capacités, et a mis en oeuvre un plan d'économies de 56 millions d'euros. Le gel des embauches et le non remplacement des départs se sont traduits par une "baisse des effectifs de 5 à 6%", a précisé son PDG.
"Monsieur Giscard d'Estaing a annoncé ce jour, avec un sourire de satisfaction, les résultats du premier semestre, à savoir une perte de 22 M d'euros, une baisse de fréquentation de 18%", a réagi Bernard Tapie dans un communiqué.
Le PDG du Club Med "a déclaré être dans l'incapacité de donner des chiffres précis sur les perspectives du deuxième semestre. Voilà l'information importante, le reste n'est que diversion", a commenté M. Tapie. Il a précisé être actuellement "à l'étranger", mais "pas en vacances au Club Med".
L'homme d'affaires risque gros: la manipulation de cours et la diffusion d'informations fausses ou trompeuses sont chacune passibles de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 1,5 million d'euros ou plus.
Dernière charge en date, Bernard Tapie a déclaré mardi à l'AFP que "cette maison est aussi transparente qu'un bunker", ajoutant qu'il comptait d'abord vérifier "un certain nombre de points" figurant dans les comptes du Club Med avant de prendre une décision.
"Il y a quelque chose d'ahurissant pour nous de voir que quelqu'un comme Bernard Tapie, qui a touché 390 millions de cadeau de l'Etat dans l'affaire Adidas, puisse donner des leçons de transparence à des dirigeants intègres", a répliqué l'avocat du Club Med, Me Georges Kiejman.