Le gouvernement a fait marche arrière sur la fiscalité des créateurs d'entreprise, après trois jours de fronde de jeunes entrepreneurs, qui se sont baptisés les "Pigeons" et ont été rejoints par le patronat, contre les mesures fiscales du gouvernement.
"Ce que nous voulons taxer ce n'est pas le risque, c'est la rente", a déclaré le ministre de l'Economie Moscovici, précisant que selon lui la plus-value réalisée sur la vente de son entreprise par son créateur ne peut "pas être assimilée à une rente".
"Pour nous le risque doit être récompensé", a-t-il déclaré après une réunion avec des entrepreneurs, ajoutant "cela doit aussi être traité plus favorablement que le droit commun des revenus du capital".
La majorité propose dans son projet de budget d'aligner l'imposition des revenus du capital sur celle du travail. Les plus-values sur la vente de parts d'une entreprise sont donc concernées et doivent ainsi être soumises au barème de l'impôt sur le revenu, ce qui a suscité l'ire des entrepreneurs.
Faisant ainsi la différence entre les entrepreneurs qui vendent leur société et les investisseurs qui y ont placé leur argent, il a précisé que le gouvernement ne reviendrait pas sur cette promesse électorale du président François Hollande.
"Il est hors de question de remettre en cause le principe de justice, selon lequel le revenu du travail et (le revenu) du capital soient traités à égalité", a-t-il assuré.
Entre autres changements, M. Moscovici a notamment affirmé que "dorénavant, lorsqu'un entrepreneur cède sa société et réinvestit une partie de cet argent, il bénéficiera d'une exonération à la hauteur de sa part de réinvestissement". "Aujourd'hui, pour bénéficier d'une exonération, il faut réinvestir 80% de la plus-value", a rappelé M. Moscovici lors d'une conférence de presse, à laquelle ont également participé le ministre délégué au Budget Jérôme Cahuzac et la ministre déléguée aux PME Fleur Pellerin.
Reçue plus tôt dans la journée, la présidente de la plus grande organisation patronale de France, le Medef, Laurence Parisot avait qualifié l'alignement des fiscalités de capital et du travail de "grave erreur". "J'ai besoin de voir exactement le nouveau texte pour pouvoir dire que l'incident est clos", a-t-elle lancé après la réunion de l'après-midi à laquelle elle n'a pas assisté.
Etaient présents notamment Marc Simoncini (investisseur, fondateur de Meetic), Geoffroy Roux de Bézieux (Virgin Mobile), Nicolas von Bülow (investisseur), Oussama Ammar (entrepreneur) ainsi que Philippe Lemoine (chargé de l'économie numérique au Medef), Philippe Berna (président du Comité Richelieu) et celui de la CGPME Jean-François Roubaud, selon Bercy.
"On a eu l'impression que le maëlstrom avait porté ses fruits. On a l'impression de gens qui ont compris l'enjeu, qui nous ont dit qu'ils avaient bougé. Maintenant, comment, à quelle hauteur, il faut attendre des choses précises. On reste mobilisés évidemment", a réagi Jamal Labed, président de l'Afdel, association françaises des éditeurs de logiciels et de solutions internet.
"C'est positif mais j'attends les décisions précises qui seront prises", a déclaré à l'AFP Jean-François Roubaud, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CGPME). "Je souligne quand même la bonne volonté d'un gouvernement qui revient sur sa position quand il se rend compte que la piste n'est pas bonne", a-t-il ajouté.
Pour calmer la colère des jeunes entrepreneurs redoutaient de devoir verser 60% de leur plus-value à l'Etat lorsqu'ils revendraient leur affaire, le gouvernement a dans un premier temps expliqué qu'il s'agissait d'un taux s'appliquant au cas extrême d'un célibataire soumis à la tranche fiscale de 45% et vendant de plus ses parts l'année-même de la création de l'entreprise. Plusieurs abattements et exonérations étaient également prévus.
Mais cela n'avait pas suffi à apaiser le courroux des frondeurs, qui se sont baptisés "Pigeons" sur les réseaux sociaux pour protester contre la mesure.