En proposant une hausse de la TVA pour financer des allègements de charges pour les entreprises, le patron de l'UMP Jean-François Copé a ressuscité un vieux débat entre ceux qui en font un gage de compétitivité et les autres qui y voient un symbole d'injustice fiscale.
L'ancien ministre du Budget a préconisé dans le quotidien Le Parisien de mardi de "baisser les cotisations sociales, qui ne sont payées que par quelques-uns, et faire un transfert sur la TVA, qui est payée par tout le monde" autrement dit moins taxer le travail et davantage la consommation.
Ce transfert de charges est l'exacte définition de la TVA sociale que Nicolas Sarkozy avait reléguée aux oubliettes dès janvier 2008 lorsqu'il avait reconnu avoir commis une "erreur" avec cette promesse électorale.
Pour les partisans de la TVA sociale, explique en substance Gérard Cornilleau, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), cette mesure est "un gage de compétitivité" pour l'économie française.
Selon leur raisonnement, détaille l'économiste, "comme les prix à l'exportation des entreprises françaises ne supportent pas la TVA et bénéficient de l'allègement des charges sociales, on gagne en compétitivité à l'export".
A l'inverse, "les produits importés supporteraient la hausse de la TVA sans bénéficier des baisses de charges" ce qui se traduirait par un gain de compétitivité à l'import aussi.
"Tout cela est parfait si la répercussion des hausses de TVA, d'un côté, et des baisses de charges, de l'autre, est complète", note M. Cornilleau.
Mais dans le monde réel, poursuit-il, "les entreprises françaises peuvent être tentées d'augmenter leurs marges et de ne pas répercuter entièrement les baisses de charges". Quant aux importateurs, "il n'est pas sûr qu'ils répercutent entièrement la hausse de la TVA".
Reste la troisième inconnue de cette équation complexe : le comportement des salariés. "Soit ils acceptent une certaine baisse de leur pouvoir d'achat, on gagne de la compétitivité, et la mesure fonctionne, soit ils obtiennent des hausses de salaires en contrepartie des hausses de prix des produits importés et il n'y a plus de gains de compétitivité".
Moralité, selon cet économiste, il ne faut pas en attendre de "miracle" de la TVA sociale qui peut tout juste se traduire "provisoirement" par un gain de compétitivité.
"Une TVA sociale appliquée à l'ensemble de l'économie n'aurait que des effets marginaux", assure également Alain Trannoy, de l'Ecole des hautes études en sciences sociale (EHESS).
François Fillon a enfoncé un autre coin dans la proposition du secrétaire générale de l'UMP, relevant que la hausse de la TVA allemande l'avait pratiquement alignée sur celle de la France (19% contre 19,6%). Et une appréciation de la TVA française, a-t-il fait valoir, se traduirait par un nouveau "décalage", contraire aux objectifs de convergence fiscale prônés par son gouvernement.
Derniers points : la TVA sociale est-elle injuste et facteur d'inflation, comme le laisse entendre la ministre de l'Economie Christine Lagarde ?
"La hausse de TVA généralisée en Allemagne n'a pas déclenché de processus inflationniste, par ailleurs assez peu probable dans le contexte actuel d'une économie molle", relève Alain Trannoy.
Quant aux caractère injuste de la TVA sociale qui pèserait davantage sur les faibles revenus, il pourrait être amorti, selon lui, en ne touchant pas au taux réduit (5,5%) qui s'applique aux produits alimentaires et en accordant des chèques aux foyers les plus modestes.