L'ex-PDG de l'assureur AIG Hank Greenberg s'est défendu mardi d'avoir détourné 4,3 milliards de dollars, comme l'en accuse l'ancien numéro un mondial de l'assurance, aujourd'hui nationalisé.
Maurice, dit "Hank", Greenberg, 84 ans, a longuement défendu l'indépendance de la société SICO qu'il dirige, durant son interrogatoire devant un jury de 10 personnes, qui est appelé à décider dans quelques semaines si SICO doit ou non reverser cette manne.
Patron emblématique d'AIG pendant près de 40 ans, M. Greenberg avait été poussé au départ en mars 2005, à une époque où des enquêtes pour manipulations comptables visaient le leader mondial de l'assurance, au fonctionnement très opaque en raison de ses myriades de sociétés.
Cette opacité a surpris la communauté financière lorsque le colosse s'est effondré en pleine crise financière en septembre, débouchant sur une nationalisation en urgence pour éviter une faillite aux conséquences mondiales. Depuis l'automne, le groupe a été renfloué à hauteur de 170 milliards de dollars par l'Etat fédéral.
L'affaire se concentre sur l'entité Starr International ou "SICO", une "société soeur" d'AIG, souligne l'accusation, portant le nom du fondateur de ce qui est devenu AIG, C.V. Starr, et fondée en 1970. Au coeur des enjeux: des actions AIG stockées là depuis les années 1970, dont la valeur a bondi de 120 millions de dollars à 4,3 milliards en 2005.
M. Greenberg a été le président de SICO pendant des années, et il dirige toujours aujourd'hui cette entité, dont il a revendiqué mardi la pleine autonomie.
L'avocat d'AIG Theodore Wells avait résumé lundi l'affaire à "une histoire d'hommes" spoliés: les salariés d'AIG à qui devaient bénéficier ces actions AIG, destinées à entrer dans leur rémunération.
Depuis sa création, "SICO était supposé prendre ces actions et les loger dans un fonds, et utiliser ces actions pour le bénéfice des salariés d'AIG, en alimentant un plan de rémunération de long terme", a expliqué l'avocat.
Mais selon M. Greenberg, "SICO était totalement indépendant, le plus grand actionnaire d'AIG", et la société ne versait de rémunération à des cadres d'AIG que dans la mesure où ils atteignaient des objectifs de performance.
"Le plan de rémunération était conçu pour encourager les employés d'AIG à faire mieux", a-t-il dit.
Les bénéficiaires pouvaient également appartenir à d'autres satellites du groupe, CV Starr, Airco ou SICO, a-t-il souligné.
M. Wells avait dépeint un Maurice Greenberg rongé par "la colère" d'avoir été poussé hors d'AIG, l'accusant d'avoir "trahi" les engagements de SICO et "détourné" le rôle de cette entité, en décidant indûment de conserver la manne d'actions AIG.
Les actionnaires de SICO "avaient confiance en moi et dans ce que j'avais fait chez AIG durant les décennies écoulées", a répliqué mardi M. Greenberg, "ils avaient peur de l'avenir" et ce sont eux qui auraient décidé de garder les actions, a-t-il expliqué.
"Je crois qu'ils avaient le droit" de suspendre les versements aux cadres d'AIG, a-t-il dit.
L'avocat de SICO, David Boies, avait pour sa part expliqué lundi que les statuts de SICO prévoyaient qu'en cas de liquidation, le bénéficiaire des actifs n'était pas AIG mais un fonds caritatif enregistré aux Bermudes, reprochant à l'assureur de vouloir aujourd'hui "se servir dans la boîte de gâteaux".
"Je mets au défi quiconque de trouver quoi que ce soit dans ces documents indiquant que (les actifs de SICO) soient destinés à AIG", avait-il martelé.