Avec le partenariat annoncé avec Yahoo!, le géant des logiciels Microsoft a enrôlé un grand de l'internet pour l'aider dans sa propre lutte contre Google, déplaçant le combat sur le terrain d'un adversaire qui ne cesse de le narguer sur ses propres marchés.
Cela fait des années que Microsoft investit lourdement dans les moteurs de recherche sur internet, afin de s'assurer une part plus conforme à son rang d'un marché publicitaire en expansion et où Google est le roi.
Mais malgré tous ses milliards, le groupe qui est l'une des plus grosses valeurs de la Bourse de New York et équipe quelque 90% des ordinateurs avec son système d'exploitation, fait encore figure de petit poucet de la recherche sur internet, avec seulement 2,7% du marché mondial (8,4% du marché américain).
Et il craint de laisser s'envoler un débouché prometteur puisque, selon le cabinet de recherche Forrester, ce marché devrait grandir de 15% par an pendant encore plusieurs années. Rien qu'aux Etats-Unis, le marché pourrait atteindre 30 milliards de dollars en 2014, estime le cabinet.
Les derniers efforts de Microsoft ont été bien reçus par les spécialistes, le moteur de recherches Bing lancé en juin semblant performant.
Mais pour autant les experts ne sont pas sûrs que Bing et le partenariat annoncé avec Yahoo!, qui porte exclusivement sur la recherche sur internet, permettra de remettre en cause la suprématie de Google.
La part de marché américaine de "Micro-Hoo", comme le partenariat est déjà surnommé, frôle les 30%: "d'un coup cela devient une alternative" à Google, alors que séparément les deux groupes n'ont que peu de poids, relève l'analyste indépendant Rob Enderle.
M. Enderle, interrogé par l'AFP, souligne en outre que Google, s'étant créé des ennemis avec sa position dominante, pourrait se voir délaissé par des annonceurs: "il y a beaucoup de gens qui aimeraient autant ne pas faire affaire avec Google".
"D'un point de vue stratégique, c'est un mouvement offensif de Microsoft pour s'en prendre à la vache à lait de Google, la recherche sur internet. Jusu'à présent, c'est Google qui était à l'offensive en attaquant le coeur de métier de Microsoft (ndlr: avec son navigateur Chrome, ses applications pour entreprise, sa messagerie gmail et l'an prochain son système d'exploitation), grâce à l'argent gagné dans la recherche", a relevé l'analyste Sid Parakh, chez McAdams, Wright, Ragen.
Le groupe de Mountain View représente "une énorme source d'agacement pour Microsoft - se présentant comme l'héritier apparent de sa suprématie fanée", souligne pour sa part M. Enderle.
Le partenariat annoncé mercredi, qui s'accompagne d'un partage de recettes mais d'aucun versement au comptant de Microsoft, permet aussi au groupe fondé par Bill Gates de se renforcer à bon compte.
A la maison de courtage Thomas Weisel Partners, l'analyste Tim Klasell relevait que "l'an dernier, la proposition de racheter Yahoo! (pour 47,5 milliards de dollars) comportait des risques importants" - jamais concrétisés puisque Yahoo! avait rejeté cette propotion.
Au contraire, le partenariat, limité à la recherche, officialisé mercredi "est beaucoup plus gérable, et malgré certains risques, offre (à Microsoft) une meilleure occasion de rentabiliser ses investissements dans la recherche".
Pour Danny Sullivan, rédacteur en chef du site spécialisé SearchEngineLand.com, "Micro-Hoo" pourrait ne pas modifier beaucoup le rapport de forces. Tant Google que Microsoft vont encore devoir "faire exactement ce qu'il fallait faire avant le partenariat: fournir une excellente expérience dans la recherche, qui puisse retenir les gens".