par Ruma Paul et Sanjeev Miglani
DACCA (Reuters) - Les sept djihadistes qui ont tué 20 personnes dans la nuit de vendredi à samedi à Dacca étaient Bangladais et cinq étaient connus des services de police, ont annoncé les autorités qui étudient leurs liens éventuels avec des groupes islamistes internationaux.
La plupart des victimes ont été tuées à la machette par le commando qui a fait irruption vendredi soir dans un restaurant huppé du quartier diplomatique de la capitale. Après une douzaine d'heures, une centaine de policiers ont donné l'assaut. Six islamistes ont été tués, un septième a été arrêté.
"Tous les hommes étaient Bangladais. Cinq d'entre eux étaient fichés comme activistes et ceux qui sont chargés de faire respecter la loi ont essayé à plusieurs reprises de les arrêter", a déclaré à la presse samedi soir le chef de la police nationale, Shahidul Hoque.
L'Etat islamique, qui a revendiqué le massacre, a diffusé des photos de cinq combattants qui auraient participé au massacre, souriant devant un drapeau noir, selon le site internet de veille spécialisé SITE.
La responsabilité de l'EI n'a pas été confirmée. Le ministre de l'Intérieur, Asaduzzaman Khan, a indiqué dimanche à Reuters que les auteurs de cet acte n'avaient formulé aucune demande. Il a confirmé la mort de six d'entre eux et a souligné que le septième était seulement considéré comme un suspect. Le ministre à en outre à nouveau nié toute implication de l'Etat islamique.
Selon lui, trois des six assaillants tués avaient moins de 22 ans et étaient portés disparus depuis six mois.
Le ministre avait assuré la veille qui ni l'EI, ni Al Qaïda n'étaient impliqués et réaffirmé la position du gouvernement selon laquelle des activistes locaux étaient responsables de la série d'assassinats qui se sont produits dans le pays ces 18 derniers mois.
"Cela a été fait par JMB", a déclaré le ministre, évoquant le Jamaat-ul-Mujahideen Bangladesh (JMB), qui dit représenter l'Etat islamique au Bangladesh.
L'inspecteur général adjoint de police Sahidur Rahman a déclaré à Reuters dimanche que les autorités étudiaient d'éventuels liens entre les assaillants, qu'il a présentés comme des personnes plutôt éduquées et originaires de familles riches, pet les groupes internationaux comme l'Etat islamique et Al Qaïda.
RÉCITER DES VERSETS DU CORAN
Quoiqu'il en soit, cet acte marque un tournant dans les violences islamistes au Bangladesh, pays de 160 millions d'habitants, majoritairement musulman.
Jusqu'à présent, elles visaient des individus revendiquant un mode de vie laïque ou des membres de minorités religieuses. Or, celle de vendredi, survenue en fin de période du ramadan, semble avoir été plus organisée que les autres.
Les islamistes ont repéré les étrangers dès qu'ils sont entrés dans le restaurant. Ils ont ordonné aux Bangladais de se lever avant de commencer à tuer, dit-on de source proche de l'enquête. Les Bangladais ont dû fermer les yeux et réciter des versets du Coran. Un Bangladais s'est vu reprocher de dîner avec des non musulmans durant le Ramadan, ajoute-t-on.
Parmi les victimes figurent neuf Italiens, sept Japonais et un Américain, ainsi que trois Bangladais ou d'origine bangladaise. Deux policiers ont été tués au début du siège.
Jusqu'à l'attaque de vendredi, les autorités bangladaises maintenaient qu'il n'y avait pas de lien opérationnel entre les islamistes bangladais et les réseaux djihadistes internationaux.
Les autorités ont attribué les violences qui ont visé ces 18 derniers des défenseurs des libertés, des homosexuels ou des membres de minorités religieuses, à JMB et à un autre groupe local nommé Ansar al Islam.
Ansar, considéré comme le mouvement le plus dangereux des deux et le mieux organisé, a fait allégeance à Al Qaïda tandis que Jamaat-ul-Mujahideen dit représenter l'Etat islamique.
"Nous ne pouvons pas dire d'emblée quel est le groupe derrière tout cela. Mais c'étaient des terroristes qui étaient bien entraînés", a déclaré le général Naeem Ashfaq Choudhuri, directeur des opérations militaires de l'armée du Bangladesh.
(Danielle Rouquié et Jean-Philippe Lefief pour le service français)