Le Premier ministre russe Vladimir Poutine a mis en garde mercredi l'Union européenne contre une possible nouvelle crise du gaz cet été en raison de l'intention de la Russie de cesser complètement l'approvisionnement via l'Ukraine si Kiev ne peut pas payer sa part.
"Cela pourrait se produire fin juin ou début juillet : l'arrêt complet du transit de notre gaz" par l'Ukraine, a déclaré M. Poutine au cours d'une conférence de presse.
"Nous traversons tous une crise économique très dure et l'économie ukrainienne souffre encore plus, peut-être, que les autres. Personne en Russie n'a l'intention de jubiler sur les difficultés ukrainiennes à payer les produits qu'elle reçoit... Mais il faut payer", a affirmé le Premier ministre russe en visite à Helsinki.
"Gazprom a le droit de demander un paiement par avance. Pas de pré-paiement, pas de gaz !", a-t-il lancé, soulignant que le géant gazier fournirait "exactement la quantité de gaz pré-payée".
Profitant de sa visite en Finlande, pays membre de l'UE, M. Poutine a réitéré ses appels à l'Union européenne pour qu'elle aide l'Ukraine à payer son gaz, expliquant que Kiev n'avait pas les moyens financiers de stocker dans des réservoirs souterrains le gaz nécessaire au pays pour l'hiver.
L'Ukraine a besoin de 500 millions de dollars (350 million d'euros) par mois jusqu'à octobre pour stocker ce gaz nécessaire, sans quoi elle sera "obligée de pomper le gaz destiné à l'Europe", a encore estimé M. Poutine.
Aussi, "nous proposons que ce problème soit réglé avec l'UE. Mais toutes nos tentatives auprès de la Commission européenne ont été infructueuses. Nous n'avons eu qu'une seule et même réponse: nous n'avons pas d'argent pour l'Ukraine", a-t-il affirmé.
La Russie répète depuis plusieurs semaines que l'Ukraine, sévèrement frappée par la crise économique mondiale, aurait des difficultés à payer ses factures de gaz, ce qui pourrait mener à une répétition de la crise gazière de janvier. Gazprom avait fermé ses vannes en direction de l'Europe, affectant une douzaine de pays de l'UE en plein hiver.
Kiev dément les affirmations de Moscou et insiste sur le fait que l'Ukraine sera en mesure d'honorer ses factures.
Mais les autorités ukrainiennes semblent actuellement devoir se concentrer sur l'immédiat.
"Il nous reste 500 millions de dollars à payer. Nous avons encore du temps d'ici au 7 juin (date limite pour le règlement de la facture de mai, ndlr) et je crois que cet argent sera trouvé", a déclaré le ministre ukrainien de l'Energie Iouri Prodan, en réponse à M. Poutine.
Ce sont pourtant les difficultés financières de Kiev à payer le gaz en provenance de Russie qui ont plongé les deux pays dans une guerre des tarifs, Gazprom accusant Kiev de voler le gaz destiné à ses clients occidentaux.
Le conflit a provoqué deux semaines d'interruption des livraisons de gaz russe vers l'UE qui achète à la Russie un quart de ses besoins. Or 80% environ de ce volume transite par l'Ukraine.
Mercredi, M. Poutine a d'ailleurs insisté pour que la Finlande autorise la construction du gazoduc sous-marin Nord Stream en mer Baltique, un projet qui permettrait de livrer le gaz en évitant l'Ukraine.
"Je ne vois pas une seule raison pour qu'on ne nous autorise pas à poser ce gazoduc dans la zone économique finlandaise, d'autant qu'il ne nuit absolument pas aux intérêts de la Finlande", a-t-il dit.
Ce projet de 7,4 milliards d'euros est soutenu par l'Allemagne, mais il doit encore être approuvé par la Finlande, la Suède et le Danemark, au large desquels devrait passer le Nord Stream.
"Je suis sûr que si tout est conforme sur un plan écologique, on pourra construire ce gazoduc", a répondu le Premier ministre finlandais Matti Vanhanen, estimant que la décision interviendrait en septembre ou octobre.