Volcan, révoltes en Tunisie et en Egypte: face à la multiplication des évènements qui alourdissent la facture des voyagistes depuis plusieurs mois, l'idée de la création d'une sorte de fonds d'indemnisation a été lancée en France à l'image de ce qui existe aux Pays-Bas.
Coût du volcan islandais: 126 millions d'euros pour le tour-opérateur britannique TUI Travel, numéro un en Europe. Les événements en Tunisie et en Egypte pourraient affecter ses prochains résultats à hauteur de 35 millions d'euros.
En France, aucun chiffre global de l'impact des troubles dans les deux pays n'a été publié, Thomas Cook France l'estimant pour sa part à 3 ou 4 millions. Pour l'ensemble du groupe britannique, il se monterait à 24 millions d'euros.
Début février, l'Association de tour-opérateurs français (Ceto) estimait que l'envoi seul de 30 avions à vide pour récupérer des touristes en Egypte coûterait 2 millions d'euros.
A chaque fois, les voyagistes règlent seuls la facture. Aucun assureur ne garantit la perte d'exploitation liée à des troubles ou le remboursement de frais supplémentaires pour rapatrier des touristes.
"Effectivement, les assureurs et assisteurs excluent de leurs conditions la prise en charge des conséquences des événements tels que manifestations, émeutes ou coups d'Etat", rappelle Me Emmanuelle Llop, avocate spécialiste du droit du tourisme.
Alors que la situation de force majeure prévaut, elle "ne comprend pas selon quelle justification juridique - et économique - le coût de ces événements non assurables devraient demeurer à leur charge", dit-elle à l'AFP.
Jeudi, Jean-Marc Siano, président de Nouvelles Frontières, a été le premier à en appeler aux pouvoirs publics pour réclamer la constitution d'un fonds de mutualisation à l'image de ce qui existe aux Pays-Bas.
Dans ce pays, un "fonds pour les calamités" a été créé en 2000 à l'initiative de tours opérateurs néerlandais, pour rembourser les agences de voyages confrontées à ce genre de situation, un fonds "unique au monde", selon sa porte-parole, principalement financé par les voyageurs.
Plus de 7 millions d'euros ont été dépensés dans ce cadre en dix ans, auxquels devraient s'ajouter 2 millions d'euros avec les rapatriements et les indemnisations de quelque 5.000 touristes néerlandais qui se trouvaient en Egypte et en Tunisie.
Denis Wathier, patron de Thomas Cook France, explique pour sa part à l'AFP qu'"au delà du coût du rapatriement des clients, il faut compter aussi avec le manque à gagner engendré par des prestations non réalisées et, en plus, avec des baisses de réservations", donc un impact beaucoup plus long que l'événement lui-même.
Selon lui, créer un tel fonds serait "une bonne idée" pour "une activité à risque où, en plus, les marges sont faibles", avec à la clé la question de la survie d'acteurs du tourisme.
Lundi, le président du Ceto René-Marc Chikli a évoqué le sujet avec le secrétaire d'Etat au Tourisme Frédéric Lefebvre qui "a encouragé les professionnels à approfondir leurs réflexions" concernant la création d'un tel fonds.
Pour le co-président du réseau d'agences AS Voyages (Afat Voyages et Selectour), Jean-Pierre Mas, "l’idée d’un fonds de garantie obligatoire des producteurs mérite d’être étudiée" même si "le transfert de la responsabilité du fabriquant sur le voyageur ne (l’)enthousiasme pas à priori".
Maître Llop craint que l'idée soit mal accueillie en France "où le client-consommateur est sur-protégé et où la question du prix du forfait, même à quelques euros près, demeure cruciale en termes de concurrence".