Les enquêteurs travaillant sur le retentissant scandale politique de corruption qui secoue la Corée du Sud ont demandé lundi l'arrestation de l'héritier de Samsung Lee Jae-Yong, qui serait un nouveau coup dur pour le géant de la téléphonie.
Le premier conglomérat du pays en termes de chiffre d'affaires, qui représente 20% du PIB sud-coréen, se remet à peine de sa pire déconvenue commerciale, quand il avait été contraint l'an dernier de cesser la production du Galaxy Note 7 au motif des risques d'explosion de cet appareil.
Dans un communiqué, l'équipe d'enquêteurs spéciaux planchant sur le grave scandale qui a déjà conduit à la destitution de la présidente Park Geun-Hye, a dit avoir demandé à la justice un mandat d'arrêt contre le vice-président de Samsung Electronics (KS:005930), qui est le fils du président du groupe Samsung Lee Kun-Hee.
Le tribunal du district central de Séoul a indiqué de son côté qu'il statuerait mercredi.
L'arrestation de Lee Jae-Yong, qui a été entendu la semaine dernière pendant 22 heures sur des soupçons de corruption, pourrait avoir un impact "important" sur l'économie sud-coréenne, a reconnu Lee Kyu-Chul, un porte-parole de l'équipe d'enquêteurs.
"Mais nous pensons que la justice est plus importante", a-t-il ajouté.
Les enquêteurs avaient fait savoir la semaine dernière que M. Lee était considéré comme un suspect dans ce scandale à tiroirs centré autour de Choi Soon-Sil, la confidente de la présidente.
Cette dernière est actuellement jugée pour avoir profité de ses relations avec Mme Park afin de soutirer des sommes astronomiques aux conglomérats sud-coréens qui ont versé des millions de dollars à des fondations privées créées par cette confidente de l'ombre.
- 43 milliards de wons -
Plus d'une dizaine de personnes ont été arrêtées, dont Mme Choi, les anciens ministres de la Culture et des Affaires sociales, un ancien directeur de cabinet présidentiel et un professeur d'université.
M. Lee, 48 ans, est soupçonné d'avoir approuvé les versements à Mme Choi, qui auraient eu pour objectif d'obtenir des faveurs du gouvernement.
Samsung est le conglomérat qui s'est montré le plus généreux auprès des fondations de Mme Choi, et en lui versant par ailleurs des millions d'euros sous couvert de financer en Allemagne les entraînements sportifs de cavaliers sud-coréens, parmi lesquels la fille de la confidente.
L'ensemble des pots-de-vin versés par Samsung s'élèvent à 43 milliards de wons (34,2 millions d'euros), a déclaré le porte-parole des enquêteurs. Il a précisé que M. Lee était également soupçonné de détournement de fonds pour avoir utilisé l'argent de Samsung pour ces actes de corruption.
Il s'expose en outre à des poursuites pour "parjure" pour avoir affirmé à une commission d'enquête parlementaire que les versements n'avaient pas été faits en échange de faveurs.
Dans un communiqué, Samsung juge "difficile à comprendre" la requête des enquêteurs: "Nous pensons que le tribunal prendra la bonne décision."
Cela fait des mois que les enquêteurs entendent M. Lee et d'autres cadres dirigeants de Samsung pour déterminer en particulier si le groupe a soudoyé Mmes Choi et Park afin d'obtenir le feu vert du gouvernement à une fusion controversée en 2015.
Ce rapprochement entre deux unités du groupe, Cheil Industries et C&T, était considérée comme une étape cruciale pour assurer une passation de pouvoir en douceur au profit de Lee Jae-Yong.
Elle avait été vertement critiquée par certains actionnaires au motif que la valeur de C&T aurait été délibérément sous-estimée, mais la Caisse nationale de retraite (NPS), gros actionnaire de Samsung sous tutelle du ministère des Affaires sociales, avait donné son feu vert à l'opération.
L'ancien ministre des Affaires sociales, Moon Hyung-Pyo, dont les services coiffaient le NPS à l'époque, a été formellement inculpé lundi d'abus de pouvoir pour avoir poussé les dirigeants du NPS -dont il est ensuite devenu le patron- à accepter la fusion.
Mme Park, accusée pour sa part de "collusion" avec Mme Choi, son amie de 40 ans, a été destituée par le Parlement début décembre. Cette décision doit encore être entérinée par la Cour constitutionnelle.