L'Italie a renoué avec la croissance au premier trimestre, après trois ans de récession et espère désormais récolter les fruits des réformes du gouvernement Renzi en matière d'emploi, mais reste aux prises avec une équation budgétaire serrée.
Le produit intérieur brut (PIB) de la troisième économie de la zone euro a crû de 0,3% au 1er trimestre (après avoir stagné au précédent), un chiffre supérieur aux attentes des économistes, selon une première estimation publiée mercredi par l'institut de statistiques (Istat).
Cette bonne surprise a été saluée à la Bourse de Milan, qui gagnait plus de 1% vers 13H25 GMT.
Si l'Italie ne fait pas aussi bien que la France (+0,6%) en ce début d'année, il s'agit néanmoins de son meilleur chiffre de croissance depuis début 2011. Elle a au total enchaîné 14 trimestres de récession ou sans croissance, à la seule exception du 3e trimestre 2013 (+0,1%).
Le chiffre est "supérieur à nos attentes", s'est réjoui le ministre de l'Economie, Pier Carlo Padoan. "Il est trop tôt pour crier victoire, mais c'est le signe que la politique du gouvernement a fait prendre un virage à l'économie".
Grâce à un cocktail composé de moins d'impôts, de stimulations de la consommation, d'investissements et de réformes, l'Italie a su "saisir la fenêtre d'opportunité" créée par la politique monétaire et par la chute des prix du pétrole, a-t-il souligné.
Paolo Mameli, économiste de la banque Intesa Sanpaolo (MILAN:ISP), pense également qu'il vaut éviter tout "triomphalisme" à ce stade, mais n'exclut pas "une accélération de la croissance déjà lors du trimestre en cours".
Le président du lobby patronal Confindustria Giorgio Squinzi s'est en revanche montré plus tiède, évoquant un chiffre "positif, (mais) pas enthousiasmant" et laissant entendre que la récession n'avait peut-être pas dit son dernier mot.
La nouvelle devrait en tous cas mettre du baume au cœur du chef du gouvernement Matteo Renzi, en plein bras de fer avec une partie de la classe politique et de l'opinion, profondément rétives à ses réformes, en particulier le récent Jobs Act, qui vise à libéraliser le marché du travail.
- Frémissement de l'emploi -
L'Italie devrait boucler l'année 2015 sur une croissance de 0,7%, qui pourrait s'accélérer encore les deux années suivantes, mais fait toujours face à un taux de chômage très élevé (13% en mars, 43,1% chez les jeunes) qui entrave la confiance et la reprise.
"Les chiffres d'aujourd'hui montrent que la forte amélioration des indicateurs de confiance n'était pas une illusion d'optique. (...) Mais pour que cela devienne un processus durable, il faudra plus de bonnes nouvelles du marché de l'emploi", estime Paolo Pizzoli, économiste de la banque ING (AMS:ING).
Un frémissement est peut-être en train de s'opérer. Selon l'Institut national de la prévoyance sociale (INPS), les embauches en contrat à durée indéterminée ont nettement progressé au cours du premier trimestre 2015, tandis que les contrats temporaires sont en recul. "La route est encore longue mais la machine est repartie", a commenté M. Renzi.
Mais même ainsi, l'Italie ne semble pas au bout de ses peines, en particulier pour ce qui touche sa gigantesque dette publique (2.135 milliards d'euros soit 132,1% du PIB).
Le gouvernement a eu fin avril la désagréable surprise de voir la Cour constitutionnelle invalider une disposition de la réforme des retraites de 2011, ce qui devrait le contraindre à indemniser 6 millions de retraités.
En cas de restitution complète, la facture pourrait monter à plus de 17 milliards d'euros selon la presse et menace la prévision officielle d'un déficit public de 2,6% du PIB cette année.
Interrogé à ce sujet mercredi à Bruxelles, le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, a indiqué en avoir discuté cette semaine avec M. Padoan, lequel lui aurait promis "des mesures dans les tout prochains jours". "Il n'y a pas de changement majeur de notre opinion sur l'Italie. Le travail est en cours", a-t-il souligné.
"Nous trouverons un moyen de rester dans les clous des règles européennes, nous trouverons une solution nous permettant d'être crédibles comme nous l'avons été jusqu'ici", avait pour sa part assuré mardi M. Renzi.