par Mariam Karouny et Tom Miles
BEYROUTH/GENEVE (Reuters) - Les combats en Syrie semblaient interrompus sur la plupart des fronts dimanche, au deuxième jour d'application de l'accord de trêve russo-américain, qui semble donc globalement tenir même si plusieurs violations ont été dénoncées et si des informations font état de frappes aériennes dans la province d'Alep.
L'accord est le premier du genre à être mis en oeuvre depuis quatre ans et, s'il est respecté, il marquera la trêve la plus importante depuis le début du conflit syrien en 2011.
Entré en vigueur vendredi à minuit, il ne concerne toutefois pas les opérations contre les djihadistes de l'Etat islamique et les combattants du Front al Nosra, affilié à Al Qaïda.
Moscou et Damas ont assuré qu'ils poursuivraient leur offensive contre ces deux groupes mais d'autres factions rebelles disent craindre d'être elles aussi visées.
Acceptée par le président Bachar al Assad et la plupart de ses adversaires, la trêve doit permettre à la fois l'acheminement d'aide humanitaire aux populations civiles et l'ouverture de nouveaux pourparlers pour tenter de trouver une issue à la guerre, qui a déjà fait plus de 250.000 morts et 11 millions de réfugiés et déplacés.
Des insurgés, tout comme l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) basé à Londres, ont rapporté que des frappes aériennes avaient touché au moins six villes et villages à l'ouest et au nord d'Alep et un village de la province d'Hama, dans le centre du pays.
L'ARMÉE D'ASSAD DIT RESPECTER L'ACCORD
L'opposition au régime de Damas a accusé la Russie d'avoir procédé à ces frappes et ajouté vouloir en appeler aux Nations unies et aux pays qui soutiennent le processus de paix. Mais elle a assuré qu'elle continuait de respecter la trêve.
"Il a été décidé de rester calme, de ne rien faire, et je pense qu'ils vont s'en tenir à la trêve", a déclaré Salim al Mouslat, porte-parole du Haut conseil pour les négociations (HCN). "La journée d'hier était la première pendant laquelle les gens ont vraiment pu sortir dans les rues."
Une source militaire syrienne a déclaré samedi que l'armée régulière ne violait pas l'accord de trêve. Le ministère russe de la Défense s'est refusé à tout commentaire.
La Russie, dont l'intervention militaire directe dans le conflit a renforcé la position d'Assad, a dit avoir recensé neuf cas de violation de la trêve en 24 heures, parmi lesquels des tirs d'artillerie dans la province de Lattaquié.
Sergueï Kouralenko, responsable du centre de coordination russe en Syrie, a néanmoins déclaré que la trêve était "globalement" respectée.
Pour sa part, Salim al Mouslat a expliqué que le HCN attendait toujours des précisions sur les moyens mis en oeuvre pour veiller au respect de la trêve, ajoutant que les sanctions en cas d'éventuelles violations n'étaient pas encore clairement définies.
Selon l'OSDH, plusieurs personnes ont été blessés lors des frappes aériennes visant dimanche plusieurs villes et villages de la province d'Alep.
Son directeur, Rami Abdoulrahmane, a ajouté que certaines des localités visées, parmi lesquelles Daret Azza, étaient contrôlées par le Front al Nosra et par d'autres groupes islamistes.
CONFUSION
D'autres attaques ont visé les villages et les villes de Kabtan al Djebel, Andane, Hreitane, Kfar Hamra et Ma'aret al Artik, a dit l'OSDH. Toutes ces localités sont situées dans l'ouest de la province d'Alep où opère l'Armée syrienne libre, qui est concernée par la trêve.
"Nous ne savons pas quels avions ont mené les attaques, de même que nous ne sommes pas certains qu'il puisse s'agir d'une violation de la trêve parce qu'il n'est pas certain que ces villes sont concernées par la trêve", a déclaré Rami Abdoulrahmane.
Une vidéo envoyée à Reuters par un chef rebelle montre une frappe sur une autre localité, Harbnafseh, à 6h30 (04h30 GMT) et une autre à 07h00 (05h00 GMT) selon la voix entendue dans cette vidéo.
Des rebelles ont aussi accusé les forces gouvernementales d'avoir lancé une offensive terrestre pour tenter de prendre le village d'Harbnafseh, dans la province d'Hama, proche de plusieurs villages alaouites fidèles au pouvoir de Damas.
"Nos combattants sont en train de repousser l'attaque (...) Le régime essaie d'en reprendre le contrôle", a dit le lieutenant-colonel Abou Hamed, responsable du conseil militaire Djaïch al Tahrir, une coalition de groupe armée dépendant de l'Armée syrienne libre, qui soutient la trêve.
Le centre de coordination russe en Syrie a précisé avoir reçu des Etats-Unis une liste de 69 groupes armés d'opposition ayant accepté les conditions de la trêve, a rapporté par ailleurs l'agence russe Interfax.
La Russie a directement reçu l'engagement de 17 groupes armés de l'"opposition modérée", a précisé le centre dans un communiqué cité par Interfax.
(Mariam Karouny et Tom Perry, avec Alexander Winning à Moscou; Nicolas Delame et Marc Angrand pour le service français)