WASHINGTON/PARIS/ISTANBUL - Le président français Emmanuel Macron a souligné vendredi lors d'un entretien téléphonique avec son homologue américain Donald Trump la nécessité que l'offensive turque lancée mercredi dans le nord-est de la Syrie cesse au plus vite, a déclaré l'Elysée.
La France et les Etats-Unis, qui partagent des préoccupations communes, resteront étroitement coordonnés dans les prochains jours, a ajouté la présidence française dans un communiqué diffusé dans la nuit de vendredi à samedi.
Plus tôt dans la journée, l'administration Trump a annoncé qu'elle était disposée à prendre des sanctions économiques supplémentaires contre la Turquie, alliée des Etats-Unis au sein de l'Otan, si cela venait à être nécessaire.
Ankara veut créer une "zone de sécurité" dans la région frontalière turco-syrienne pour en écarter les miliciens kurdes et y transférer plusieurs millions de Syriens réfugiés sur son territoire.
Lancée mercredi, l'opération "Source de paix" a jeté sur les routes près de 100.000 personnes qui fuient les combats, dont le bilan s'élève à une centaine de morts selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme.
Durant son entretien téléphonique avec Donald Trump, Emmanuel Macron a "souligné la nécessité avant toute chose d'empêcher toute résurgence de Daech dans la région, de soutenir ceux qui se sont battus sur le terrain à nos côtés contre les terroristes et de protéger les populations civiles", a rapporté l'Elysée.
A cette fin, a ajouté la présidence française, "le président de la République a rappelé la nécessité de faire cesser l'offensive turque au plus vite".
Cette offensive a débuté moins de trois jours après la décision de Donald Trump de redéployer une partie du millier de militaires américains présents dans cette zone.
Mais le Pentagone a rejeté vendredi les accusations selon lesquelles les Etats-Unis ont abandonné les forces kurdes, soutien de poids dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI).
"Personne n'a donné de feu vert à cette opération de la Turquie, au contraire", a déclaré le secrétaire américain à la Défense, Mark Esper, lors d'un point de presse. "Nous avons fait pression très fort à tous les niveaux pour que les Turcs ne débutent pas cette opération", a-t-il ajouté, accusant Ankara de porter préjudice aux relations bilatérales avec Washington.
Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a annoncé depuis la Maison blanche que Donald Trump avait autorisé la préparation de nouvelles sanctions "très importantes" contre la Turquie, sans que l'on ne sache précisément dans quelles circonstances ces sanctions pourraient être instaurées.
Mnuchin a déclaré que Trump était inquiet que les troupes turques puissent éventuellement cibler des civils et se voulait très clair sur la nécessité pour la Turquie de garantir qu'"aucun combattant de Daech" puisse s'échapper.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a assuré vendredi que la Turquie ne stopperait pas son offensive contre les miliciens kurdes, "peu importe" les diverses déclarations.
D'après les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes des Unités de protection du peuple (YPG), l'intervention turque menace leurs capacités à maintenir en détention les milliers de djihadistes qu'ils ont capturés en reprenant le nord-est de la Syrie.
A Kamichli, la plus grande ville que les Kurdes contrôlent dans la région, cinq combattants de l'EI ont réussi vendredi à s'enfuir de leur prison à la suite d'intenses bombardements dans le secteur, ont annoncé les FDS.
Selon les autorités, une voiture piégée a explosé dans la ville, tuant trois civils et en blessant neuf autres. L'Etat islamique a revendiqué l'attentat via son organe de propagande Amak.
(Makini Brice, Jeff Mason, Idrees Ali, Phil Stewart et Humeyra Pamuk à Washington, Michel Rose à Paris, Ali Kucukgocmen à Istanbul; Nicolas Delame et Jean Terzian pour le service français)