Le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev, a annoncé jeudi que le gouvernement allait devoir réduire ses dépenses de 5% et les entreprises publiques se résoudre à des sacrifices afin de compenser le ralentissement de la croissance.
"Il est évident qu'il n'y a pas d'argent en trop", a estimé Dmitri Medvedev lors d'une réunion gouvernementale consacrée au budget 2014-2016.
"C'est pourquoi il va falloir nous engager sur la voie des réductions de dépenses budgétaires de 5% qui concerneront tous les postes, sauf ceux qui sont protégés", a-t-il ajouté, alors que le président, Vladimir Poutine, s'est pour l'instant refusé à toute entaille dans le budget de la Défense.
Le ministre de l'Economie, Alexeï Oulioukaev, a de son côté évoqué des économies budgétaires de "5% à 10%" et mis en garde contre des arbitrages qui se font généralement "au profit des dépenses existantes et au détriment des investissements".
Sur les six premiers mois de l'année, le budget fédéral enregistre un excédent de 1,2% du produit intérieur brut, selon le chef du gouvernement, qui a souligné que la part des hydrocarbures étaient passée en ce début d'année sous le seuil des 50%.
Le pays reste en outre solide financièrement avec une dette publique d'environ 10% de son PIB.
Mais le gouvernement a déjà prévenu que les revenus budgétaires seraient moins importants que prévu compte tenu du fort ralentissement de l'activité économique ces derniers mois (1,4% sur un an au premier semestre). Il n'attend plus qu'une croissance de 1,8% pour 2013, alors qu'il espérait 3,6% au début de l'année, contre 3,4% en 2012 et 4,3% en 2011.
"Dans les conditions actuelles (...) il nous faut procéder à certaines limitations" du budget, a martelé M. Medvedev.
Cet assèchement des ressources réduit les marges de manœuvre du pouvoir pour relancer l'activité et pour remplir les promesses sociales de campagne de Vladimir Poutine avant la présidentielle de 2012.
vive réaction des chemins de fer
Pour apporter une bouffée d'air frais aux ménages et entreprises, Dmitri Medvedev s'est prononcé en faveur d'un gel des tarifs des services publics en 2014 (électricité, gaz, transport ferroviaire...) puis d'une hausse limitée à l'inflation en 2015 et 2016.
Cette idée "difficile", selon le Premier ministre, a provoqué une vive réaction de la part de la société nationale des chemins de fer RZD.
Son patron, Vladimir Iakounine, a prévenu mercredi qu'en cas de gel, RZD pourrait diviser son programme d'investissements par quatre et voir ses comptes basculer dans le rouge pour la première fois de son histoire.
Dans un projet de lettre au ministère des Transports, révélé par le quotidien Vedomosti, le transporteur va encore plus loin. Il prévient qu'une telle mesure se traduira par une perte nette de 1,4 milliard d'euros l'an prochain et la mise à temps partiel de 370.000 employés, soit près du tiers de ses effectifs.
Il observe également qu'elle mettrait en péril le financement de travaux gigantesques, comme la modernisation du mythique transsibérien jusqu'à Vladivostok, pourtant ordonnés par Vladimir Poutine pour relancer la croissance.
Malgré cet avertissement, le président russe aurait déjà donné son accord, selon la chaîne de télévision RBK.
L'idée est particulièrement séduisante parce qu'elle permettrait de limiter l'inflation, dont le niveau actuel, au dessus de 6%, empêche la banque centrale de réduire ses taux d'intérêt pour soutenir l'activité économique.
L'économiste Mikhaïl Galkine, de la banque VTB Capital, tout en reconnaissant un impact négatif à court terme pour les entreprises publiques comme RZD ou Gazprom, juge qu'un gel des tarifs constituerait "un signe tangible que les réformes structurelles tant attendues des services publics progressent" et donnerait "un soutien économique pour les industries".
"Pour les entreprises publiques, cela montre la nouvelle réalité à laquelle elles devront s'adapter pour améliorer leur efficacité", a-t-il ajouté.