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Avec ses mineurs, la petite ville espagnole de Bembibre lutte pour survivre

Publié le 10/06/2012 13:15

Derrière ses mineurs en grève depuis trois semaines, la petite ville de Bembibre, dans le nord de l'Espagne, lutte pour sa survie, au coeur de l'un de ces bassins miniers menacés d'asphyxie par la fermeture progressive des puits de charbon.

"Mon père était mineur, mes frères aussi, mon grand-père travaillait dans la mine quand on utilisait encore le piolet. C'était une façon de vivre", confie Paul Martinez, un mineur de 39 ans occupé, avec ses compagnons, à mettre le feu à un tas de pneus barrant une route aux environs de Bembibre.

"C'est le seul moyen pour que quelqu'un se rende compte qu'ici, ce n'est plus seulement un problème d'emploi, mais un problème social, très vaste", ajoute Paul Martinez. Si les mines devaient fermer, "ce serait précipiter la mort de toute la ville".

"C'est comme cela tous les jours", raconte-t-il, en montrant la fumée épaisse et âcre qui s'élève au-dessus des collines verdoyantes.

En pleine restructuration depuis 20 ans, les mines de charbon espagnoles ont progressivement fermé. Une quarantaine sont encore en activité, principalement dans le nord, faisant vivre 8.000 mineurs.

Mais le charbon espagnol, plus cher que le charbon exporté, dépend des subventions de l'Etat, lesquelles sur décision de Bruxelles prendront fin en 2018.

Ajoutant à ce déclin, le gouvernement, engagé dans une rude chasse au déficit, a décidé de réduire de 63%, de 301 millions d'euros en 2011 à 111 millions cette année, les aides au secteur.

De quoi condamner, selon les mineurs, jusqu'à 30.000 emplois directs ou indirects dans des régions dont l'économie bat au rythme de la mine depuis des générations.

A Bembibre, dans cette petite ville de 10.000 habitants nichée dans la province de Leon, la population toute entière s'inquiète.

"S'ils ferment la mine, cela deviendra un désert. Même nous, il se peut que nous devions fermer", confie José Manuel Jañez, patron de bar de 57 ans, derrière son comptoir.

"S'ils ne travaillent plus, ils ne seront plus payés, et nous, nous ne pourrons plus manger. C'est ainsi", commente elle aussi Soraya Moreno, une jeune femme de 33 ans, qui a ouvert il y a deux mois un magasin d'articles sportifs, parce qu'elle ne trouvait pas de travail ailleurs.

Pour défendre leurs puits de charbon contre une fermeture qui paraît inexorable, les mineurs du nord de l'Espagne se mobilisent chaque jour depuis trois semaines, coupant routes et voies ferrées.

Alors les cordons de policiers anti-émeutes, casqués, se mettent en place, et s'engage une nouvelle scène de guérilla champêtre, avec échange de pétards et tirs de balles en caoutchouc.

La mobilisation "se radicalise de jour en jour", affirme Guillermo Sanchez, un responsable du syndicat UGT, qui dénonce "la position intransigeante du gouvernement".

"Ce dont nous parlons, ce sont nos postes de travail, pas de hausses de salaires, et cela il faut le défendre quelles qu'en soient les conséquences", ajoute-t-il.

"De jour en jour, il y a de plus en plus de violences avec la police", raconte Florencio, un homme de 40 ans, visage couvert, à un barrage routier près de Bembibre.

Florencio est mineur depuis trois ans seulement. "Avant, je travaillais comme je pouvais, comme chauffeur d'ambulance ou comme serveur. Dans les bassins miniers, il y a la mine ou les services, sinon rien", assure-t-il.

Depuis le début de la crise économique en 2008, les rares industries de substitution qui avaient vu le jour, par exemple des usines de fabrication d'éoliennes, ont soit licencié, soit fermé.

Il ne reste plus que la mine, l'activité traditionnelle que toute la région se bat pour conserver.

"Ici, quand les mineurs veulent quelque chose, c'est une guerre ouverte", lance Tania Rozados, une jeune femme de 25 ans qui sert le pain dans la boulangerie de son père. "C'est la seule façon pour que quelqu'un fasse attention à eux".

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