Homme du sérail, Jerome Powell, déjà haut responsable à la banque centrale américaine, prend la succession lundi de la démocrate Janet Yellen à la tête de la Fed, marquant une certaine continuité dans la politique monétaire même si c'est un républicain.
"Je m'engage à prendre les décisions avec objectivité (..) dans la longue tradition d'indépendance de la politique monétaire", a-t-il déclaré lorsqu'il a été choisi par le président Donald Trump qui a rompu avec la tradition en ne renommant par Mme Yellen, pour un second mandat.
A 65 ans, Jerome Powell, un avocat et riche ancien banquier d'affaires devient le 16e président de la puissante banque centrale, une institution un peu plus que centenaire. Le Sénat l'a confirmé à ce poste fin janvier à l'écrasante majorité de 85 voix contre 12.
Même s'il n'est pas économiste de formation, ce juriste a aussi été un haut responsable du Trésor sous la présidence de George Bush père et a été nommé en 2012 gouverneur de la banque centrale par le président démocrate Barack Obama.
A ce poste, il a travaillé avec l'ancien président de la Fed Ben Bernanke lorsque, à partir de 2013, la Réserve fédérale a commencé à alléger son soutien massif à l'économie.
Il a ensuite cohabité pendant quatre ans avec la démocrate Janet Yellen, la première femme jamais nommée à la tête de la Fed dont il a toujours approuvé les décisions monétaires notamment sur la sortie de la politique d'assouplissement monétaire quantitatif (QE) initiée après la crise financière, puis sur la remontée progressive des taux d'intérêt.
Il paraît s'inscrire dans la même logique d'un lent mais déterminé resserrement monétaire: "il est temps de normaliser" progressivement les taux d'intérêt, a-t-il indiqué lors de son audience de confirmation au Congrès fin novembre.
"Il ne devrait pas y avoir de changement significatif de politique monétaire avec M. Powell", a estimé pour l'AFP Tim Duy, professeur d'économie, spécialiste de la Fed. "C'est un homme très capable de créer un consensus", assure pour sa part l'économiste de FTN Financial, Chris Low.
Pour Brendan Mulhern, de BNY Mellon, "Powell a appris son métier en cours de route et incarne ainsi la pensée dominante au sein de la Fed aujourd'hui".
L'ancien président de la Fed Ben Bernanke a écrit de lui qu'il avait "une réputation de modéré et de conciliateur".
- Pondéré -
Ce républicain au discours toujours pondéré se révèle donc un choix rassurant et familier pour les marchés même si certains lui reprochent de ne pas être titulaire d'un doctorat en économie, une première depuis trois décennies pour un dirigeant de la Fed.
Cela pourrait tourner à son avantage, affirme David Wessel de la Brookings Institution, qui pense que M. Powell saura "mieux parler aux gens du Congrès" et mieux expliquer à l'opinion publique la politique de la Fed que ses prédécesseurs.
Ses positions ne font toutefois pas l'unanimité notamment sur la régulation.
Il a affirmé qu'il n'y avait plus de banques "trop importante pour faire faillite" (too big to fail), après les efforts de la loi Dodd-Frank qui a imposé des normes de capitaux, de liquidités et des tests de résistance. Il s'est aussi dit prêt à "ajuster" ces règlementations, provoquant l'ire de la sénatrice démocrate Elizabeth Warren, la bête noire de Wall Street.
"Je crains beaucoup que la Fed ne réduise les réglementations imposées après la crise financière sous le leadership de M. Powell", a affirmé Mme Warren qui n'a pas voté pour lui lors de sa confirmation.
Né à Washington le 4 février 1953, Jerome "Jay" Powell, marié et père de trois enfants, a fait des études de sciences politiques à Princeton University (New Jersey) puis de droit à Georgetown University (Washington).
Cet ancien partenaire de 1997 à 2005 du mega fonds d'investissements américain Carlyle dispose d'une fortune évaluée entre 20 millions et 55 millions de dollars.