par Edward McAllister
LIBREVILLE (Reuters) - Les forces de sécurité ont été largement déployées samedi à Libreville, la capitale du Gabon, après la confirmation par la Cour constitutionnelle de la victoire d'Ali Bongo à l'élection présidentielle.
Six personnes avaient été tuées dans des émeutes après l'annonce par le ministère de l'Intérieur de la courte victoire du président sortant lors du scrutin du 27 août. La famille d'Ali Bongo dirige le pays depuis près d'un demi-siècle.
Le chef de l'opposition Jean Ping, qui affirme qu'une centaine de personnes sont mortes lors des récentes violences, estimait que l'élection avait été entachée de fraudes et en avait contesté les résultats devant la Cour constitutionnelle.
Des camions transportant des policiers et des soldats, dont certains vêtus d'équipements anti-émeutes, ont pris position aux principaux carrefours et intersections de Libreville dès samedi matin.
Le circulation était réduite dans la capitale gabonaise, nombre d'habitants ayant choisi de rester chez eux. Aucun incident n'a été signalé dans l'immédiat.
La décision de la Cour constitutionnelle a été annoncée vendredi soir. Peu après, Ali Bongo a promis d'ouvrir le dialogue politique entre ses alliés et ses opposants.
Réagissant publiquement à la décision de la cour, Jean Ping l'a qualifiée d'"injuste". "Nous allons nous assurer que le choix du peuple gabonais est respecté. 2016 ne sera pas 2009", a-t-il affirmé devant ses partisans en référence à la précédente élection, entachée de soupçons, qui avait conduit Ali Bongo au pouvoir.
CRITIQUES DE L'UE
Dans son recours devant la plus haute juridiction du pays, l'opposant faisait valoir que les résultats enregistrés dans la province de Haut-Ogooue présentaient des irrégularités, Bongo ayant recueilli dans son fief 95% des suffrages pour un taux de participation de 99,9%.
Une mission d'observation électorale de l'Union européenne avait signalé des anomalies dans cette province. Dans un communiqué conjoint, la porte-parole de la diplomatie européenne Federica Mogherini et le Commissaire à la Coopération internationale Neven Mimica estiment que "la confiance du peuple gabonais concernant l'intégrité du processus électoral peut, légitimement, être mise en doute".
"Contrairement au protocole d'accord signé avec le gouvernement" gabonais, la mission d'observation "n'a eu qu'un accès très limité au processus de recours et de contentieux", ajoutent les représentants européens.
"En vue de futures élections, le besoin d'une réforme du système électoral s'impose, de façon à le rendre plus crédible", estime le communiqué.
Le ministère français des Affaires étrangères a indiqué que cette déclaration "reflétait la position de la France".
La Cour constitutionnelle avait accepté d'examiner les résultats avec la présence d'observateurs de l'Union africaine mais elle a jugé irrecevables les feuilles d'émargement fournies comme preuves de la fraude présumée présentées par Jean Ping.
La cour a annulé les résultats de 21 bureaux de vote à Libreville en raison d'irrégularités, accentuant la victoire d'Ali Bongo qui est déclaré élu avec 50,66% des voix contre 49,85% précédemment.
"C'est une mascarade. La Cour constitutionnelle a insulté le peuple et n'a pas respecté la démocratie", s'est indigné Clay Martial, partisan de l'opposition, au quartier général de Ping, samedi.
(Avec Emmanuel Jarry et Mathieu Rosemain; Pierre Sérisier pour le service français)