Aux confins de l'Ile-de-France, la zone d'emploi de Houdan et les 28 communes qui la composent affichent le taux de chômage le plus bas de France: 4,7%. Si certains arguent d'une coopération fructueuse entre entreprises et pouvoirs publics, la statistique cache une réalité plus complexe.
Sur ce discret territoire niché entre Dreux et Versailles, en bordure de forêt de Rambouillet, s'étend une campagne préservée, à une heure de voiture de Paris.
Ici, pas d'usine ou de zone commerciale tentaculaire défigurant le paysage. Le long de la RN12 se succèdent petites communes proprettes et gros bourgs cossus, prisés pour leur calme par des personnalités comme Charles Aznavour, Florent Pagny ou encore le milliardaire François Pinault, qui y ont élu domicile.
La zone, à l'origine agricole, semble aussi attirer les PME, notamment du tertiaire.
On n'est certes ici "pas dans la Silicon Valley, qui a une capacité d'attraction mondiale forte, mais on a tous les ingrédients d'un écosystème performant pour préserver l'emploi local", estime Christophe Assens, professeur à l'Institut supérieur de management de l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.
Patrick Mitchell a été l'un des tout premiers entrepreneurs à s'installer à la périphérie de Houdan (3.000 habitants), sur ce qui n'était alors que des champs. Quinze ans plus tard, son entreprise de distribution de vis et fixations de haute précision compte plus d'une vingtaine de voisins.
"On a un maire (le député LR Jean-Marie Têtard) et une communauté de communes" qui facilitent l'installation des entreprises "avec des logements sociaux, des prix attractifs, ce qui fait qu'aujourd'hui la zone d'activités et la zone industrielle sont pratiquement remplies à ras bord", témoigne M. Mitchell.
- Tissu de PME -
La politique fiscale est aussi incitative. "Les entreprises qui sont venues s'installer ici ont quitté des zones où les taux (d'imposition) étaient voisins de 24, 25, 26% alors que nous, on est à 17%", abonde Jean-Jacques Mansat, président de la Communauté de communes du pays houdanais (CCPH).
Si l'opticien Krys est le plus gros pourvoyeur d'emplois sur la zone, avec plus de 500 salariés sur son site de Bazainville, le tissu économique local est surtout constitué de PME, aux activités souvent complémentaires, et de petits commerces - le nombre de grandes surfaces ayant été volontairement limité par les pouvoirs publics.
Un écosystème local qui séduit, visiblement. "Ce tissu d'entreprises, il est majeur. Sans (cela), c'est compliqué de se développer, de faire confiance. Les gens, on les connaît, ils sont juste à côté, on va manger le midi ensemble...", explique Vincent Chouzenoux, qui chapeaute plusieurs bureaux d'études installés sur le territoire de la CCPH.
"Au lieu d'aller chercher des solutions ou des réponses en dehors du territoire", les employeurs, souvent fédérés en réseaux associatifs, vont "les chercher à l'intérieur", explique Christophe Assens. Cela est valable pour la recherche de main d'oeuvre comme pour les fournisseurs.
- "Ça ne leur saute pas aux yeux" -
Les performances de cette zone d'emploi sont cependant à relativiser, estime Eric Tondu, maire de Maulette, commune limitrophe de Houdan. "Peut-être que le taux de chômage est faible, mais beaucoup de gens vont travailler à l'extérieur", à Versailles, Saint-Quentin-en-Yvelines ou Paris, tempère-t-il.
Mais ces résidents - plutôt CSP+ - "génèrent quand même de l'emploi localement: éducation, santé, commerces de proximité...", nuance Olivier Léon, chef du service Etudes de l'Insee.
Dans cette région exempte de grands ensembles urbains et de cités sensibles, une certaine forme de pauvreté subsiste toutefois, bien que peu visible. L'antenne des Restos du coeur de Houdan aide quelque "150 familles" -souvent rurales et/ou mono-parentales- chaque semaine.
Et à Houdan même, "200 habitants sont au chômage", fait remarquer Philippe Seray, élu municipal d'opposition. "Eux, quand on leur dit qu'il y a le plein emploi, ça ne leur saute pas aux yeux!"