par Emma Thomasson et Sonya Dowsett
BERLIN/MADRID (Reuters) - Trop grands ou trop petits, près du tiers des vêtements et des chaussures testés par des mannequins chez Adidas (DE:ADSGN), Benetton et autres Gap ne correspondent pas à la taille figurant sur l'étiquette, ce qui explique leur taux de retours élevé sur internet, véritable casse-tête pour les distributeurs.
Une définition plus précise des tailles contribuerait à réduire ces retours coûteux pour les groupes de mode en ligne comme l'allemand Zalando et le britannique ASOS, et à améliorer la satisfaction de leurs clients.
"Si vous essayez (un vêtement de) la même marque dans une couleur différente, sa taille varie parfois", relève Savina Bellotto, mannequin chez Zalando.
Les rabais pratiqués pour réduire les stocks témoignent de la difficulté des groupes de mode à préserver leurs marges. L'avertissement lancé par ASOS sur ses résultats il y a dix jours a provoqué la chute de son action et de celles de tout le secteur de la mode en ligne.
Pour faire baisser le taux de retours, les grandes groupes comme Zara, propriété de l'espagnol Inditex (MC:ITX), et le suédois H&M proposent sur leur site un logiciel d'aide à la taille. Les clients saisissent leur taille et leur poids, des données traitées parallèlement aux historiques d'achats et de retours.
"C'est une charge très lourde pour le distributeur", relève Nivindya Sharma, directrice chez WGSN, société spécialisée dans les tendances. "Les retours gratuits étaient au départ un avantage concurrentiel, mais ils sont désormais la norme."
LE FACTEUR HUMAIN
Environ la moitié des Américains devraient retourner les vêtements qu'ils ont commandés en ligne lors des fêtes de fin d'année en raison d'une taille inadaptée, selon une étude de la société BodyBlock.
"Les retours coûtent une fortune. D'abord, vous faites un client mécontent, ensuite vous devez également retraiter la commande et remettre le vêtement en stock", explique Charlotte Kula-Przezwanski, de chez Columbus Consulting.
Pour résoudre ce problème, Zalando, numéro un européen de la mode en ligne, a déclaré à Reuters qu'il recueillait davantage de données en ligne et de commentaires des modèles qui testaient les nouvelles collections.
Les mannequins, qui essaient nos vêtements, signalent que 30% d'entre eux sont trop grands ou trop petits, précise Stacia Carr, directrice de l'ingénierie de Zalando.
Les retours sont un enjeu majeur pour Zalando, car environ la moitié des produits achetés sont renvoyés.
Les coûts générés par les retours ont contribué à la perte annoncée par Zalando au troisième trimestre, qui a entraîné une chute de l'action et a alimenté les spéculations selon lesquelles il pourrait constituer une cible pour les géants chinois du secteur comme Alibaba (NYSE:BABA) et JD.com.
RUBIK'S CUBE
Un changement de tissu ou de forme peut avoir des conséquences importantes, poursuit Stacia Carr, relevant qu'une grande marque de jeans avait vu les retours liés à une taille inadéquate augmenter après un changement de coupe.
La petite équipe de mannequins de Zalando testait au départ uniquement les chaussures, elle teste désormais également les vêtements. Les robes, qui sont les articles les plus vendus, sont également les plus retournées.
Les mannequins essaient jusqu'à 120 chaussures par jour, en mesurant l'intérieur avec une règle spéciale et en notant comment chaque chaussure s'adapte au talon, à la cheville et aux orteils.
"C'est très subjectif. C'est la raison pour laquelle nous établissons une moyenne entre trois modèles", a déclaré Gerard Nieto, modèle chez Zalando.
Résoudre le problème de la taille tient du Rubik's cube, tant les variables sont nombreuses, ajoute Stacia Carr.
"Nous savons que les Nordiques aiment les choses plus amples et 'oversized'. Plus vous allez au Sud, plus c'est ajusté, les corps sont différents," remarque-t-elle. "Nous sommes tous encore surpris d'avoir réussi à résoudre partiellement la question, car le sujet est si complexe."
Les distributeurs estiment que la hausse des retours est un élément inhérent au développement du commerce électronique.
"La tendance est à la croissance des taux de retours dans le monde au fur et à mesure que le marché devient mature", note Roger Graell, directeur du commerce électronique chez le groupe de mode espagnol Mango, qui prévoit réaliser au moins un cinquième des ventes en ligne d'ici 2020.
"Ce que nous espérons faire avec la technologie, c'est ralentir ce taux de croissance."
(Avec Anna Ringstrom à Stockholm; Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Jean-Michel Bélot)