Le mouvement HLM s'est alarmé vendredi de l'absence de discussion sur la politique du logement en France et de l'annonce de mesures "improvisées" qui vont déstabiliser le secteur, demandant à être reçu par Emmanuel Macron.
Confrontée à une "attaque sans précédent" contre le logement social, "alors que les locataires HLM sont de plus en plus pauvres", l'Union sociale pour l'habitat (USH, 723 bailleurs sociaux) dont le 78e congrès se tiendra du 26 au 28 septembre à Strasbourg, a demandé à être "reçue sans délai" par le président de la République.
"Nous n'avons eu aucune réponse", a déploré Frédéric Paul, délégué général de l'USH lors d'une conférence de presse.
Le présentation de la "stratégie logement" du gouvernement aura lieu le 20 septembre. Il s'agit d'un des trois secteurs, avec le transport et l'emploi, devant générer le plus d'économies au sein du projet de loi de Finances 2018, selon le ministère de la la Cohésion des territoires.
Le mouvement HLM fait face à des "annonces assez largement improvisées, faites par le ministère de la Cohésion des territoires sur l'injonction extrêmement autoritaire de Bercy", a jugé de son côté Marianne Louis, secrétaire générale de l'USH.
"Tous les acteurs du secteur l'expriment: depuis des mois, il n'y a pas de discussion sur la politique du logement en France", a-t-elle déploré, tandis que la Confédération nationale du logement (CNL) a réclamé vendredi la tenue d'Etats généraux du logement.
Après avoir dénoncé l'effet "inflationniste" des aides personnelles au logement (APL) dans le parc privé - qui représentent 10 milliards d'euros, sur les 19 milliards versés à 6,5 millions de ménages-, le gouvernement a changé son fusil d'épaule.
Il affirme vouloir réduire les APL dans le secteur social, versées par l'État aux bailleurs sociaux pour leurs locataires, en imposant à ces organismes HLM une baisse de leurs loyers d'un montant équivalent.
Cette chute de leurs ressources -qui irait jusqu'à 3 milliards d'euros dans le cas d'une baisse de 50 euros- pourrait être compensée, dit le gouvernement, par des conditions d'emprunt plus favorables ainsi que par des ventes accrues de logements sociaux.
Ainsi, céder "40.000 logements par an" pourrait "apporter jusqu'à 3 milliards d'euros" a affirmé Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires.
- "Enfumage" -
"C'est de l'enfumage", rétorque Frédéric Paul. "Sur nos 4,5 millions de logements, une partie n'est pas vendable, notamment 1,3 million situés dans les quartiers prioritaires de la ville. Et en zone détendue, les gens veulent s'acheter un pavillon, pas un logement collectif!".
Sur les 140.000 logements sociaux à vendre aujourd'hui, les bailleurs n'en cèdent que 8.000 par an, ce qui pourrait être "au maximum doublé".
Ces ventes sont très encadrées, le locataire devant avoir des moyens financiers suffisants pour éviter que l'état de la copropriété ne se dégrade. En outre les logements construits depuis moins de 10 ans sont légalement invendables.
Une fois leurs ressources amputées, les bailleurs sociaux ne pourront plus lancer la construction de 100.000 logements neufs par an, un effort conséquent qui fait déjà grimper leur dette, actuellement de 140 milliards d'euros, fait valoir l'USH.
Ils n'auront pas non plus les moyens d'entretenir leurs immeubles, dit-elle.
"Le gouvernement prétend faire un +choc d'offre+, or il crée les conditions d'une chute de la production" de logements neufs, aujourd'hui au plus haut en France, de l'ordre de 400.000 logements par an, a estimé M. Paul.
Et augmenter les surloyers (SLS, ou Supplément de Loyer de Solidarité) payés par les ménages dont les revenus excèdent de plus de 20% les plafonds de ressources, soit 4% du parc HLM, comme l'évoque le gouvernement, ne permettra pas non plus de renflouer les caisses, estime l'USH.
Ils rapportent 100 millions d'euros par an aujourd'hui: même un doublement ne rapportera pas suffisamment pour compenser les économies évoquées.
Les entreprises du bâtiment, promoteurs, professionnels de l'immobilier et associations de défense des consommateurs se sont tour à tour vivement inquiétés des projets du gouvernement en matière de logement.
Le parc HLM loge environ 10 millions de personnes en France, dont un tiers ont des ressources inférieures au seuil de pauvreté.