PARIS (Reuters) - Trois syndicats de policiers ont signé mercredi soir avec le gouvernement un protocole d'accord qui prévoit notamment une revalorisation de leurs salaires et une réorganisation du temps de travail dans la police nationale.
Si cet accord a été salué par les signataires - Unité SGP Police-Fo, Alliance, et Unsa Police -, il n'a pas apaisé d'autres syndicats et l'association Mobilisation des policiers en colère (MPC), qui a appelé à manifester jeudi soir à Paris.
L'annonce de cet accord, conclu après deux soirées de négociations au ministère de l'Intérieur, est tombée à pic pour Christophe Castaner, qui présidait jeudi la cérémonie d'accueil de 1.282 nouveaux agents de la préfecture de police de Paris.
Le ministre de l'Intérieur a souligné que les mesures prévues constituaient à la fois une reconnaissance de l'Etat et un "engagement à travailler ensemble sur la révision globale de l'organisation horaire dans la police nationale".
La négociation sur cette réorganisation s'ouvrira en janvier et durera six mois, a-t-il précisé. C'est dans ce cadre que devront être réglées les questions épineuses des 275 millions d'euros d'heures supplémentaires en souffrance et de la "fidélisation" des policiers à leurs postes.
Christophe Castaner n'a pas exclu que cela puisse aboutir à une loi d'orientation et de programmation.
"On en a parlé avec les partenaires sociaux", a-t-il dit à des journalistes. "Le Président de la République n'exclut pas la possibilité que nous travaillions aussi sur un texte de loi mais l'objectif est d'aller plus vite que le chemin d'un texte de loi pour engager cette transformation en profondeur."
Une première revalorisation du traitement des policiers, par le biais d'une hausse de 40 euros par mois de leur allocation de maîtrise, entrera ainsi en vigueur au 1er janvier 2019, soit un coût de 70 millions d'euros en année pleine, selon le ministre.
"GYROS BLEUS"
Le protocole prévoit une deuxième salve de 30 euros à compter du 1er juillet et une troisième, également de 30 euros, à partir du 1er janvier 2020. Mais celles-ci sont subordonnées à l'aboutissement de la négociation sur l'organisation du temps de travail et les heures supplémentaires.
L'accord prévoit aussi une augmentation de 0,5 point de l'indemnité de sujétion spéciale de la police (ISSP) au 1er janvier prochain.
Christophe Castaner a dit vouloir rencontrer d'autres syndicats, représentant notamment les commissaires.
Alternative Police-CFDT, quatrième syndicat du ministère de l'Intérieur depuis les dernières élections professionnelles, s'est pour sa part dit "scandalisé" par une "parodie de dialogue social" qui, selon lui, ne règle rien.
"Aucune mesure de fond sur la situation alarmante de la police nationale n'est apportée", déclare dans un communiqué cette organisation, qui dénonce "un accord fallacieux qui brade les intérêts des policiers dans le seul but de museler leur mécontentement" et envisage une "action de rue" à la mi-janvier.
Le syndicat Vigi fait pour sa part valoir que cet accord ne concerne qu'une partie des personnels du ministère et de la police et réclame "de vraies avancées" en matière de pouvoir d'achat, "pas un os à ronger".
Vigi soutient le mouvement des "Gyros bleus", calqué sur les "Gilets jaunes" et lancé par l'association Mobilisation des policiers en colère" (MPC), qui se veut à la fois apolitique et "asyndicale" et a appelé ses sympathisants à manifester jeudi soir à Paris, devant le commissariat du VIIIe arrondissement.
Pour un porte-parole de MPC, interrogé par Reuters, les mesures prévues par l'accord, "c'est des broutilles, une petite carotte" qui ne répond pas aux attentes des "flics de base".
Les "policiers en colère" n'ont pas l'intention de s'en tenir à leur manifestation de jeudi soir, a-t-il ajouté. "C'est la base qui se soulève contre un système dans lequel elle ne se reconnaît plus."
(Caroline Pailliez, avec Emmanuel Jarry, Myriam Rivet et Julie Carriat, édité par Yves Clarisse)