PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron accompagnera l'élan réformateur qui s'est emparé de l'Union européenne depuis le vote en faveur du Brexit, lors de son premier Conseil européen jeudi et vendredi à Bruxelles.
Fort de sa victoire à la présidentielle sur un programme pro-UE et de rencontres avec le noyau dur européen qui ont mis en lumière les convergences, le président français exprimera sa vision de l'avenir de l'Union et poursuivra les contacts.
Il rencontrera en particulier en marge du Conseil les membres du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie), dont les intérêts et orientations se heurtent souvent à ceux des pays d'Europe occidentale.
Il dira à ses dirigeants qu'entre le renforcement de l'Europe de la défense qu'ils appellent de leurs voeux et la lutte contre le dumping social qu'il exige et qu'ils craignent, l'Europe doit pouvoir avancer, a-t-on déclaré à l'Elysée.
Dans un entretien à huit quotidiens européens diffusé mercredi, il déplore l'attitude de certains Etat d'Europe de l'Est, qui "trahissent" par "une approche cynique de l’Union qui servirait à dépenser les crédits sans respecter les valeurs".
Interrogé sur d’éventuelles sanctions, il se dit favorable au "dialogue, mais il doit être suivi de décisions concrètes".
Emmanuel Macron arrivera au Conseil fort de son succès aux législatives, cependant nuancé par la mise en retrait de quatre membres du gouvernement sortant en raison d'enquêtes judiciaires, qui a compliqué la formation de la nouvelle équipe.
Sa volonté de réformes européennes, une pièce majeure de son programme présidentiel, s'inscrit dans la droite ligne des travaux engagés par les Européens après le Brexit, sur lesquels reviendront les chefs d'Etat de gouvernement lors du Conseil.
La France a obtenu des ajouts, sur le climat, le dumping social et les règles commerciales, a précisé l'Elysée.
Selon le projet de conclusions obtenu par Reuters, les Européens devraient s'engager à appliquer l'Accord de Paris, rejeté par le président américain Donald Trump, et à soutenir sa mise en oeuvre par les pays signataires et les autres acteurs.
Autre axe porté par la France, la lutte contre le dumping social dans l'Union. Paris veut durcir les règles encadrant le travail détaché et a fait des propositions en ce sens, qui ne seront pas spécifiquement examinées au Conseil européen.
La France veut également accentuer la protection commerciale européenne, avec l'affirmation que l'Union répliquera aux distorsions de concurrence et étoffera son arsenal.
AVANCÉES SUR LA DÉFENSE
Parmi les principales avancées attendues lors du Conseil, l'engagement à renforcer la coopération dans le domaine de la défense, avec la validation de la proposition de la Commission pour un Fonds européen de la défense visant la recherche, le développement et l'acquisition d'équipements et de technologies.
La Commission a dit le 7 juin qu'elle allouerait 590 millions d'euros à ce fonds jusqu'en 2020 et proposé au minimum 1,5 milliard par an à partir de 2020. Avec les contributions des Etats, le fonds pourrait générer 5,5 milliards par an d'investissement dans la recherche et le développement de capacités à partir de 2020, ajoutait-elle.
Toujours dans le domaine de la défense, les Européens discuteront de la coopération structurée permanente, qui doit permettre à certains pays de travailler davantage de concert, au premier rang desquels la France et l'Allemagne.
Les Européens constateront la poursuite des migrations vers l'Europe, avec une dégradation de la situation en Méditerranée centrale et en Libye, et l'insuffisante efficacité des mesures mises en place pour garder les frontières, examiner les demandes d'asile et expulser ceux qui ne peuvent prétendre à l'asile.
Selon l'Elysée, la France et l'Allemagne ont présenté des contributions conjointes sur tous les sujets. Une volonté de parler à l'unisson qui se traduira par des positions communes au G20 de Hambourg les 7-8 juillet et des déclinaisons précises au conseil des ministres franco-allemand le 13 juillet.
Lors du dîner jeudi, la Première ministre britannique, Theresa May, doit présenter à ses homologues sa vision du Brexit, après l'ouverture des négociations lundi.
Des responsables européens ont précisé qu'ils n'attendaient rien de majeur de sa part et souligné que la position européenne était claire et portée par son négociateur Michel Barnier.
Le Conseil discutera également de la relocalisation des deux agences européennes actuellement situées au Royaume-Uni : l'Autorité bancaire et l'Agence du médicament.
Pour éviter un pugilat, chacun voulant récupérer une agence, les chefs d'Etat et de gouvernement devraient valider une procédure de désignation proposée par la présidence du Conseil et la Commission. La décision serait prise à la fin de l'année.
(Jean-Baptiste Vey, avec Gabriela Baczynska à Bruxelles, édité par Yves Clarisse)