par Balazs Koranyi
FRANCFORT (Reuters) - La Banque centrale européenne (BCE) a rétabli mercredi l'accès des banques grecques à ses opérations habituelles de refinancement, ce qui leur permettra de se passer des liquidités d'urgence plus onéreuses dont elles dépendent depuis plus d'un an.
La BCE a ajouté qu'elle se pencherait ultérieurement sur la question de l'éventuelle inclusion de la dette souveraine de la Grèce dans son programme d'assouplissement quantitatif (QE), qui passe par des rachats de titres pour un montant mensuel de 80 milliards d'euros.
Cette décision de la BCE constitue une étape importante vers un retour à une forme de normalisation pour une économie toujours en récession, qui a bénéficié l'an dernier d'un troisième plan de sauvetage depuis 2010 pour 86 milliards d'euros et reste soumise à un contrôle des capitaux.
La mesure, qui entrera en vigueur mercredi prochain, est aussi l'une des premières conséquences concrètes de l'adoption par Athènes de nouvelles réformes, qui ont déjà permis le versement par le Mécanisme européen de stabilité (MES) d'une enveloppe de 7,5 milliards d'euros d'aides financières.
La BCE dit "reconnaître l'engagement du gouvernement grec dans la mise en oeuvre du programme d'ajustement macro-économique du Mécanisme européen de stabilité et s'attend en conséquence à la poursuite du respect de cette condition".
Les banques grecques n'ont plus accès aux opérations habituelles de refinancement de la BCE depuis le début de l'an dernier, une décision prise alors que leur pays, dont la richesse a fondu d'un quart depuis 2007, semblait jouer son avenir au sein de la zone euro.
La Grèce étant notée en catégorie spéculative ("junk") par les principales agences de crédit, la BCE faisait auparavant bénéficier son secteur bancaire d'une exemption à ses propres règles, celles-ci lui interdisant d'accepter des titres mal notés en garantie en échange de la fourniture de liquidités.
C'est cette exemption que la BCE a décidé de rétablir mercredi après l'adoption par le gouvernement d'Alexis Tsipras de nouvelles réformes portant entre autres sur les retraites et les privatisations pour obtenir une nouvelle aide des créanciers du pays.
64,8 MILLIARDS D'EUROS DE LIQUIDITÉS D'URGENCE
Lors de son audition par une commission du Parlement européen mardi, le président de la BCE, Mario Draghi, a salué les efforts réalisés par la Grèce.
La BCE a dit mercredi qu'elle "examinera(it) (...) à un stade ultérieur" de possibles rachats de dette souveraine grecque en fonction notamment des progrès accomplis pour rendre la dette de la Grèce viable.
"Le rétablissement par la BCE de l'exemption pour les actifs grecs pourrait bénéficier aux principales banques grecques en terme de revenu net d'intérêt à hauteur, au maximum, de 80 millions d'euros - environ 60 millions après impôt - en fonction de l'éligibilité des actifs grecs et du niveau de décote imposé", estime le courtier grec Euroxx.
"De notre point de vue, ce sera essentiel pour la réduction des coûts de financement des banques grecques qui, avec l'assouplissement progressif du contrôle des capitaux, devrait contribuer au retour des dépôts dans le système, qui est capital", ajoute-t-il.
L'exemption de la BCE ne résout pas pour autant la totalité des problèmes des banques grecques: celles-ci ne disposent que de montants limités d'actifs éligibles comme garantie auprès de la BCE et ne pourront pas réduire fortement leur recours à la "fourniture de liquidité d'urgence" (ELA) de la BCE, sollicitée à hauteur de 64,8 milliards d'euros au total.
Si la BCE ne publie pas de données précises sur les modalités de l'ELA, on estime que le taux d'intérêt moyen de celle-ci est supérieur de 100 à 150 points de base au taux de refinancement de la banque centrale, actuellement nul.
(Marc Angrand et Bertrand Boucey pour le service français)