par Claude Canellas
MONT-DE-MARSAN, Landes (Reuters) - Dans un contexte de plus en plus tendu entre pro et anti-corrida en France et en Espagne, 600 à 800 personnes ont manifesté samedi contre les spectacles taurins durant la feria de Mont-de-Marsan (Landes).
Les manifestants se sont rassemblés sur une place de la ville dès 15h00 (13h00 GMT) à l'appel du Comité radicalement anti corrida (Crac Europe), organisateur de l'événement.
Pour Roger Lahana, vice-président du Crac Europe, "les corridas sont un divertissement sadique".
"Il n'y a plus que huit pays dans le monde qui la pratiquent", a-t-il dit à Reuters. "On a un espoir d'arriver à l'abolir totalement mais ce sera toujours trop long."
Après un happening d'une centaine de personnes portant un demi-masque de taureau, les manifestants ont défilé sur une artère de la ville jusqu'à environ 500 mètres des arènes du Plumaçon, où cinq corridas étaient programmées jusqu'à dimanche.
"Vous voulez la paix, arrêtez de tuer", "Corrida = torture légale", "Mont-de-MarsanG", ou encore "Non à la toromafia", pouvait-on lire sur les pancartes brandies par des manifestants. "Corrida basta", lançaient d'autres opposants, tandis que retentissaient des sirènes dans le cortège.
Les Fêtes de la Madeleine de Mont-de-Marsan étaient spécialement ciblées par les organisateurs car elles sont les premières des grandes ferias du Sud-Ouest avant celles de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) et de Dax (Landes).
"On fera ce qu'on a à faire, c'est-à-dire protéger notre culture et nos traditions", avait prévenu la semaine dernière lors d'une conférence de presse la maire Modem de Mont-de-Marsan, Geneviève Darrieussecq, qui est également présidente de l'Union des villes taurines françaises (UVTF).
"LA CONFRONTATION DE L'HOMME ET DU TAUREAU"
Mercredi, lors de l'ouverture des fêtes, elle avait appelé tous les habitants de la ville, depuis le balcon de la mairie, à montrer, pendant cinq jours, "que nos valeurs et nos traditions gasconnes sont essentielles et indéboulonnables".
"Interdire la corrida, c'est remettre en cause une culture historique importante qui existe depuis 35.000 ans sur le pourtour méditerranéen", estime Mathieu Ara, son directeur de cabinet, qui est par ailleurs conseiller départemental des Landes.
"C'est un spectacle. La confrontation de l'homme et du taureau a toujours fasciné", ajoute-t-il.
Mais la corrida rencontre de plus en plus d'opposition sous la pression des organisations écologistes et de défense des animaux. En Espagne, la Catalogne a banni toute corrida sur son territoire depuis 2012.
Le 5 juillet dernier, 75 militants des collectifs AnimaNaturalis et Peta avaient manifesté devant la mairie de Pampelune, au nord de l'Espagne, à la veille de l'ouverture de la feria. Venus de plusieurs pays, les manifestants en sous-vêtements s'étaient aspergés de faux sang.
Près de 6 Espagnols sur 10 (58%) sont désormais opposés aux corridas, d'après une enquête menée en janvier dernier par Ipsos Mori pour l'organisation World Animal Protection.
Les manifestations anti-taurines se sont multipliées ces dernières années, et la fréquentation des arènes a baissé de près de 50% entre 2007 et 2014, selon le ministère de la Culture espagnol.
La municipalité de Madrid a décidé l'année dernière de supprimer les subventions à l'école taurine. A La Corogne, en Gallice, la ville refuse désormais d'accueillir des corridas dans ses arènes. A Valence enfin, les lâchers de taureaux dans la ville ont été interdits.
En France, où la pratique est tolérée dans 11 départements pour cause de "tradition locale ininterrompue", une commission du ministère de la Culture a décidé, le 22 avril 2011, d'inscrire la corrida au "patrimoine immatériel de la France".
Mais cette décision a été définitivement annulée par la justice administrative pour une question de forme.
(édité par Chine Labbé)