par Robert-Jan Bartunek et Philip Blenkinsop
BRUXELLES (Reuters) - Le Canada et l'Union européenne ont signé dimanche à Bruxelles le traité CETA de libre-échange, destiné à dynamiser le commerce et l'emploi, après des semaines d'incertitude liée au rejet momentané de l'accord par le parlement de Wallonie.
Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a signé le traité aux côtés des dirigeants des institutions européennes. Cette cérémonie ouvre la voie à l'entrée en vigueur partielle de l'accord début 2017, avec la suppression de la majeure partie des droits de douane.
Le CETA va faire disparaître les tarifs douaniers sur près de 99% des marchandises. Les bénéficiaires en seront, par exemple, les constructeurs automobiles et l'industrie textile de l'UE, sur les produits desquels les droits de douane canadiens peuvent se monter à 18% jusqu'à présent.
Le Canada, de son côté, bénéficiera à l'exportation de quotas plus importants pour ce qui est du porc, du boeuf et du blé vers les marchés de l'UE. L'UE pourra exporter vers le Canada plus du double du volume actuel autorisé de fromages de "haute qualité".
Les sociétés de services pourront aussi tirer parti du CETA et les entreprises de l'UE seront autorisées à répondre à des appels d'offres pour des contrats publics au niveau des provinces et des municipalités du Canada, ce qui sera une première.
Le Premier ministre français, Manuel Valls, a estimé sur Twitter que le CETA ouvrait "de nouvelles opportunités respectant nos préférences sociales, environnementales". Il a qualifié le CETA, d'accord "équilibré", parlant à son propos de "libre-échange maîtrisé".
Au terme de sept ans de négociations, l'adoption du CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement) ne se sera pas fait en douceur. Les Wallons, qui représentent moins d'un pour cent des 508 millions d'habitants de l'UE susceptibles d'être concernés par le CETA, ont soulevé des objections qui ont empêché la signature du traité jusqu'au déblocage intervenu jeudi puis confirmé vendredi par les votes des parlements locaux de Belgique.
Le parlement de Wallonie a approuvé l'accord, puis le parlement de Bruxelles et celui de la Communauté francophone ont fait de même.
LE TTIP PAS MORT, ASSURE MALMSTRÖM
La totalité des 28 gouvernements de l'UE soutiennent le CETA, mais la Belgique ne pouvait jusqu'alors donner formellement son accord en l'absence du soutien de la totalité des entités qui la composent.
"Tout est bien qui finit bien", a déclaré le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. "Nous avons 20 négociations en cours et aujourd'hui, nous fixons les normes mondiales que l'UE et la Commission européenne souhaitent voir accepter par d'autres.
Le CETA fait figure de tremplin vers un accord plus large entre l'UE et les Etats-Unis, appelé TTIP (traité de libre-échange transatlantique), que contestent vivement nombre de syndicats et d'organisations écologistes ou politiques en Europe.
La commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a estimé samedi que le TTIP n'était pas mort et dit que les négociations se poursuivraient avec la future administration américaine issue de la présidentielle du 8 novembre.
Les partisans du CETA font valoir que cet accord va faire bondir de 20% le commerce entre le Canada et l'UE et doper l'économie européenne de l'ordre de 12 milliards d'euros par an, et l'économie canadienne de 12 milliards de dollars canadiens (8,15 milliards d'euros).
Pour Ottawa, le CETA va aider à réduire la dépendance du Canada vis-à-vis des Etats-Unis en tant que marché d'exportation. Pour l'UE, c'est le premier accord commercial passé avec un pays du G7, et c'est un succès arraché au moment où la crédibilité du bloc européen est entamée par le référendum en faveur du Brexit.
"C'est un très long processus. Une très large majorité des gens, en Europe, sont favorables à l'Europe, mais des inquiétudes existent et nous nous devons d'y répondre", a dit Cecilia Malmström. "La Commission européenne ne peut pas le faire seule".
Une centaine de manifestants altermondialistes ont affronté les forces de police, dimanche à Bruxelles, cherchant à abattre les barrières devant l'entrée principale du bâtiment où avait lieu la signature. Les manifestants ont lancé de la peinture rouge et, selon un photographe de Reuters, la police a procédé à des interpellations.
(Eric Faye pour le service français)