Pendant les journées professionnelles au Salon du Bourget qui ont débouché sur la traditionnelle moisson de commandes, les gros acteurs du secteur ont rivalisé d'originalité pour offrir à leurs clients et prospects une restauration haut de gamme dans une centaine de "chalets" VIP, l'un des plus grands restaurants éphémères gastronomiques au monde.
C'est dans ces espaces privés ultra sécurisés, qui s'étendent sur plusieurs centaines de mètres le long des pistes, dans une zone interdite au public, que les grands noms du secteur de l'aéronautique et de la défense ont paraphé leurs contrats cette semaine.
Même s'il ne s'agit souvent que de signatures "d'apparat" après des mois de négociations, les entreprises mettent les petits plats dans les grands. L'un des traiteurs de l'événement a d'ailleurs refusé aux journalistes de l'AFP l'accès aux chalets "compte tenu des enjeux stratégiques pour ses clients".
Au total, le marché de la restauration de luxe lors du Salon représente près de 10 millions d'euros de chiffre d'affaires, dont 35% seront réalisés cette année par le traiteur Potel et Chabot, qui sert en moyenne 3.000 couverts par jour.
Pour les entreprises, la qualité des mets proposés, mais aussi le service et la garantie de confidentialité nécessaire aux échanges, sont un enjeu clé pour entretenir leurs contacts et préparer des commandes à venir. Il en va aussi de leur image de marque au pays de la gastronomie.
Le restaurant du chalet du motoriste CFM, qui compte 95% de clients étrangers et a annoncé 14 milliards de dollars de commandes jeudi, tourne toujours à plein régime. "Je ne peux pas aller jusqu'à dire que c'est parce qu'un client a bien mangé qu'il va commander plus de moteurs, mais c'est sans aucun doute ce qui va faire qu'il aura envie de venir chez nous", indique Agnès Grangeat, responsable du pôle événementiel au sein du groupe Snecma.
"Nous ne sommes pas dans l'événementiel pur", insiste quant à lui Christophe Renard, président de Fauchon Réceptions. "Il s'agit vraiment d'une restauration haut de gamme qui est spécialement conçue pour des journées de travail, car les entreprises vont recevoir des clients et vont discuter des contrats", souligne-t-il.
- Hélicoptère en chocolat -
Comme chaque année, des commandes très spéciales ont été passées à la dernière minute. Potel et Chabot a par exemple livré un hélicoptère H175 en chocolat. Pour la présentation de l'E-Fan, l'avion tout électrique d'Airbus Group (PARIS:AIR), des énormes carafes à base de fruits ont également été servies dans des verres en bambou. Fauchon a lui présenté à ses clients russes des soupes froides dans des assiettes taillées dans des blocs de glace.
Autre particularité des restaurants éphémères du Bourget: compte tenu des enjeux, ils ne ressemblent en rien à des préfabriqués. Murs peints en blanc, épaisse moquette au sol, terrasses en teck avec vue plongeante sur les pistes, salles de conférence, auditorium, compositions fleurales..., tout, jusqu'à la robinetterie des toilettes, est fait pour faire oublier l'aspect temporaire des lieux. Certains espaces ont même une touche glamour, à l'image des débuts de l'histoire de l'aéronautique.
Au chalet de Dassault Aviation, d'immenses photos de pyramides s'étalent sur les murs, un hommage appuyé au Caire, après la commande de 24 Rafale en février. Chez CFM, un showroom au design digne du film "2001, l'Odyssée de l'espace" exhibe une maquette du moteur Leap. Côté restauration, Potel et Chabot propose par ailleurs à certains clients des couverts, des nappes et des assiettes stylés qu'il a lui-même conçus dans ses ateliers de Bezons (Val d'Oise).
Pourtant, certains acteurs jugent le marché plus concurrentiel qu'autrefois. C'est le cas du traiteur Lenôtre, présent depuis 1976. "Même si notre chiffre d'affaires a progressé entre 2013 et cette année, la tendance est plutôt à la baisse du nombre de prestations car les entreprises font plus attention aux coûts", explique Nathalie Bellon-Szabo, directrice générale de Sodexo sports et loisirs, à qui appartient le traiteur. L'arrivée de nouveaux acteurs qui "cassent les prix" rend également, selon elle, le marché plus "difficile".
Quant au grand public, il pourra cette année compter sur une trentaine de points de restauration. Au menu: moules-frites, pizzas, food-trucks, coquelets rôtis ou encore gésiers du sud-ouest. Une autre facette de ce salon qui se veut aussi le grand rendez-vous des fans d'aéronautique, avec près de 180.000 personnes attendues en trois jours.