PARIS (Reuters) - Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, s'est efforcé mercredi d'apaiser un malaise de plus en plus sensible dans les forces de l'ordre, à l'occasion de ses voeux à la police.
Fortement mis à contribution depuis trois ans dans la lutte contre le terrorisme, les policiers ont été endeuillés par une cinquantaine de suicides dans leurs rangs en 2017 et ont été la cible ces dernières semaines d'agressions à répétition.
A l'heure du retour d'une forme de police de proximité (la "police de sécurité du quotidien), leurs syndicats demandent notamment la fin de la "politique du chiffre", l'allègement de leurs tâches administratives et une simplification de la procédure pénale, une modernisation de leurs moyens.
"Quand vous êtes mis en cause sans fondement, quand vous êtes agressés sans autre motif que de porter l'uniforme, je veux garantir que je serai toujours à vos côtés", leur a déclaré à Rouen (Seine-Maritime) Gérard Collomb.
Le ministre avait déjà présenté ses voeux à la gendarmerie le 3 janvier, assisté mardi à ceux du syndicat Unsa Police et avait rendez-vous mercredi après-midi avec l’ensemble des syndicats représentatifs de la police nationale pour évoquer les actes de violences contre des membres des forces de l’ordre.
Il s'est aussi efforcé de répondre à leurs revendications.
"Oui, nous engagerons une réflexion autour des fameuses tâches indues", a-t-il ainsi promis. "Oui, nous réformerons aussi la procédure pénale."
Il a ainsi évoqué une extension du pouvoir des officiers de police judiciaire, la simplification des cadres d'enquête et une "forfaitisation" de certaines infractions.
"DÉFI MIGRATOIRE"
En matière de moyens, il a rappelé que 7.500 postes de policiers seraient créés en cinq ans, dont 1.400 en 2018, et que le budget immobilier de la police serait porté à 196 millions d'euros par an cette année, en augmentation de 5% par rapport à 2017, pour la rénovation des commissariats.
Le budget de l'équipement de la police sera quant à lui porté à 150 millions d'euros par an au lieu de 100 millions. En 2018, 50.000 tablettes numériques, 10.000 caméras-piéton et 3.000 véhicules seront ainsi acquis, a-t-il précisé.
Le directeur général de la police nationale, Eric Morvan, avait auparavant déclaré qu'il revenait aussi aux policiers de "faire (leur) part du boulot".
"Il nous revient à nous tous policiers, administrateurs et gestionnaires de la police de faire fructifier les moyens que vous mettez à notre disposition", a-t-il dit.
Il a invité cadres et agents à s'interroger sur la modernisation de leur fonctionnement et de leur organisation "dans le sens d'une simplification ambitieuse", à remettre en cause une "technocratie rampante, qui étouffe les services" et à repenser "certains principe de gestion des ressources humaines, dont la complexité est devenue insupportable et chronophage".
Gérard Collomb a estimé que la police aurait à faire face en 2018, en plus de la lutte contre le terrorisme et du maintien de l'ordre public, au "défi migratoire", un domaine dans lequel les interventions policières sont critiquées par les opposants à la politique du gouvernement en la matière.
"Cette question est très souvent caricaturée dans une opposition factive entre tenants de la générosité et tenants de la fermeté", a dit le ministre. "Si la police n'était pas là pour appliquer la loi, alors c'est tout le système d'asile qui imploserait (...) C'est l'équilibre-même de la société française qui se verrait mis en cause."
Il a précisé que près de 300 filières de passeurs avaient été démantelées en 2017, avec des "éloignements contraints" en hausse de 14% et 85.000 "non admissions" aux frontières.
"En 2018, cet effort devra être amplifié", a-t-il ajouté.
(Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)