Des mesures d'urgence contre les violences conjugales

Publié le 03/09/2019 18:31
Mis à jour le 03/09/2019 18:36
Des mesures d'urgence contre les violences conjugales

PARIS (Reuters) - Edouard Philippe a annoncé mardi une série de mesures contre les violences conjugales, une "horreur" qui a déjà coûté la vie à 100 femmes cette année en France, avec notamment la création de 1.000 places d'hébergement d'urgence et la mise en place du "bracelet anti-rapprochement".

    Le Premier ministre, qui a entendu les témoignages de proches de victimes, s'exprimait à l'occasion du lancement du "Grenelle des violences conjugales" qui réunira jusqu'au 25 novembre ministres, administrations, associations et proches des victimes pour trouver des solutions concrètes au phénomène des "féminicides".

    Selon les statistiques gouvernementales, une femme est tuée en France tous les deux-trois jours par son conjoint ou son ex-conjoint, "une tendance stable depuis plus de dix ans". En 2018, 121 femmes sont ainsi décédées au terme d'"une longue descente aux enfers", pour reprendre les termes du Premier ministre.

    "Depuis des siècles, ces femmes sont ensevelies sous notre indifférence, notre déni, notre incurie, peut-être sous notre machisme séculaire et au fond sous notre incapacité à regarder en face (...) cette horreur", a-t-il dit, évoquant "un processus d'emprise sexiste profondément ancré dans nos sociétés."

    Le chef du gouvernement a estimé que la première urgence était d'assurer "une mise à l'abri rapide" des femmes en danger (71% des victimes résident au même endroit que leur conjoint).

    Aux 5.000 places déjà existantes et aux 240 annoncées pour janvier 2020, les pouvoirs publics vont ajouter l'an prochain 1.000 nouvelles places de logement et d'hébergement d'urgence pour un budget de cinq millions d'euros.

    Il s'agira de 250 places dans des centres d'hébergement d'urgence et de 750 places de logement temporaire pour des périodes comprises entre six mois et un an. Une plateforme de géolocalisation sera créée pour identifier en temps réel les places disponibles.

    UN ACCUEIL "IRRÉPROCHABLE"

    Edouard Philippe a ensuite souhaité un accueil "irréprochable" des victimes dans les commissariats et gendarmeries, se faisant l'écho de témoignages défavorables sur ce point. Le ministère de l'Intérieur lancera un audit dans 400 commissariats et gendarmeries "afin d'identifier très précisément les dysfonctionnements" et la façon dont auront été accueillies 500 victimes sera évaluée.

    Un "protocole unique d'évaluation du danger" sera finalisé pour le 25 novembre à l'usage des policiers et des gendarmes. Un numéro d'écoute national, le 3919, est déjà en service.

    Déplorant des délais de traitement des dossiers "insupportables", Edouard Philippe a souhaité des "procureurs référents spécialisés" dans les 172 tribunaux français.

    "Nous expérimenterons des chambres d'urgence pour que les dossiers soient traités en 15 jours", a-t-il précisé, ajoutant que le premier test se déroulerait à Créteil.

    Pour éloigner les conjoints et ex-conjoints violents, le bracelet électronique anti-rapprochement, "qui a fait ses preuves en Espagne depuis 2004", s'ajoutera au système de "téléphone grave danger" que peuvent déjà utiliser les femmes menacées pour alerter les autorités.

   "J'ai bon espoir qu'il puisse être mis en place très rapidement dès cette année", a dit le Premier ministre.

    Enfin la législation sera modifiée pour réformer l'autorité parentale dans les cas de violences conjugales (80% des femmes victimes ont au moins un enfant).

    "On ne peut pas opérer une scission artificielle entre le conjoint et le père quand il s'agit du même homme. (...) Notre devoir c'est de protéger les enfants", a souligné Edouard Philippe.

    "Nous devons combler les manques de notre législation afin d'offrir à la justice, aux magistrats, une palette d'outils mieux adaptés à l'urgence et à la singularité des situations", a-t-il indiqué, précisant notamment que l'exercice de l'autorité parentale serait désormais suspendu "de plein droit en cas d'homicide volontaire sans qu'il soit besoin d'une décision du juge, dès la phase d'enquête ou d'instruction".

(Sophie Louet, édité par Yves Clarisse)

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