par Chine Labbé
PARIS (Reuters) - L'examen des recours de Christine Lagarde contre sa mise en examen dans l'enquête sur l'arbitrage dont a bénéficié Bernard Tapie en 2008 devrait prendre plusieurs mois, repoussant d'autant son éventuel renvoi devant la Cour de justice de la République (CJR).
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), jusque-là placée sous le statut de témoin assisté, a été mise en examen mardi pour négligence d'une personne dépositaire de l'autorité publique ayant mené à la destruction, au détournement ou à la soustraction par un tiers de fonds publics.
Elle a exclu de démissionner et annoncé qu'elle avait chargé son avocat "d'exercer tous les recours" contre une décision qu'elle juge "totalement infondée."
La défense de Christine Lagarde a trois mois pour déposer un premier recours en nullité devant la CJR, seule habilitée à juger les délits commis par des membres de gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.
Mais son avocat, Yves Repiquet, a indiqué à Reuters qu'il le déposerait "probablement avant le 15 septembre".
Il pourra ensuite se pourvoir en cassation.
Ni la CJR ni la Cour de cassation n'ont de délai pour statuer. L'examen de ces recours devrait prendre de "quelques mois" à un an, selon des sources judiciaires.
Les recours ne sont en théorie pas suspensifs et Christine Lagarde pourrait être renvoyée devant la Cour avant que ceux-ci soient examinés, précise une source judiciaire. Mais "ils seront purgés avant" le règlement du dossier, ajoute-t-elle.
DERNIER ACTE DE L'ENQUÊTE
Selon Yves Repiquet, la mise en examen de la patronne du FMI était le dernier acte de l'enquête des juges.
Mercredi, Christine Lagarde, dont le maintien en poste est entre les mains du conseil d'administration du FMI, a minimisé la portée de sa mise en examen surprise, après quatre auditions devant la CJR.
"La commission (d'instruction) s'est rendue à l'évidence que je n'avais été complice d'aucune infraction et a donc été réduite à alléguer que je n'aurais pas été suffisamment vigilante lors de l'arbitrage", a-t-elle dit.
Les charges pesant contre elle ont en effet été allégées.
L'enquête la visant était initialement ouverte pour complicité de faux par simulation d'actes et complicité de détournement de fonds publics, des délits respectivement passibles de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende et de dix ans d'emprisonnement et un million d'euros d'amende.
Le chef d'accusation finalement retenu par les juges est passible d'un an de prison et de 15.000 euros d'amende.
Sa mise en examen pour négligence "est une décision de confort pour les magistrats", estime Yves Repiquet. "Comme ça, ils n'ont pas à prendre la responsabilité d'un non-lieu, dans ce dossier sensible et politique."
Le conseil d'administration du FMI devra désormais décider s'il renouvelle ou non sa confiance à sa directrice générale, qui a succédé en 2011 à Dominique Strauss-Kahn après la démission de celui-ci à la suite de l'affaire du Sofitel de New York, dans laquelle il a bénéficié d'un abandon des poursuites aux Etats-Unis, la plaignante n'ayant pas été jugée fiable.
"La directrice générale s'est remise au travail ici et nous nous attendons à ce que le conseil d'administration soit informé très prochainement" des derniers développements de l'affaire, a déclaré jeudi le porte-parole du FMI à la presse.
L'ancienne ministre des Finances de Nicolas Sarkozy a été nommée le 5 juillet 2011 à ce poste pour une durée de cinq ans.
Un tribunal arbitral a condamné en juillet 2008 le Consortium de réalisation (CDR), véhicule public chargé de liquider les actifs du Crédit Lyonnais, à verser à Bernard Tapie 285 millions d'euros d'indemnités, dont 45 millions à titre de préjudice moral, soit 403 millions d'euros avec les intérêts.
(Edité par Yves Clarisse)