PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron a obtenu à Pékin l'assurance que la Chine jouerait un rôle stabilisateur face aux grandes crises mais les preuves de la volonté chinoise d'ouvrir davantage son marché et de rééquilibrer les échanges bilatéraux restent à apporter.
Sur le front des contrats, des autorisations d'exporter, du développement des services financiers ou de la participation au projet de la nouvelle route de la Soie, d'importants jalons ont été posés lors de la visite d'Etat du président français.
Une bonne partie de ces avancées reste cependant à acter.
Le président chinois, Xi Jinping, a assuré que la Chine oeuvrerait, en matière diplomatique, pour la paix et le bien commun, alors que les crises et les menaces s'accumulent.
"Nous avons décidé de renforcer tous azimuts la coopération internationale, de respecter le cadre et les principes de la charte des Nations unies, de préserver ensemble le multilatéralisme, d'améliorer la gouvernance de la planète, de faire face ensemble aux défis", a-t-il dit.
De quoi répondre à une préoccupation d'Emmanuel Macron, vainqueur d'un duel avec Marine Le Pen au second tour, témoin du Brexit, apôtre d'une refondation de l'Europe pour saper les populismes et sonneur d'alarme face à la fragilisation du multilatéralisme par le président américain, Donald Trump.
Le président français a salué l'action du régime chinois face à la Corée du Nord. "La Chine a été très responsable", a-t-il dit. "Elle a pour la première fois appliqué des sanctions, conformément aux décisions que nous avions prises aux Nations unies, mais elle souhaite aussi qu'il y ait un retour au calme et à la normalité."
Il a obtenu de Xi Jinping l'assurance que la France pourrait travailler avec la Chine sur la nouvelle route de la Soie, gigantesque projet d'infrastructures entre la Chine et l'Europe et instrument d'influence pour la deuxième économie mondiale.
DES PREUVES D'AMOUR TOUJOURS ATTENDUES
Xi Jinping a montré qu'il n'était pas resté sourd aux appels de son homologue à ouvrir davantage la Chine aux entreprises françaises, évoquant les impératifs de "respect mutuel" et de "concurrence loyale". Mais il n'a rien ajouté de substantiel.
La France accuse vis-à-vis de la Chine son plus important déficit commercial bilatéral, à 30 milliards d'euros.
Si des ventes pour plusieurs milliards de dollars de moteurs CFM (Safran/GE) ont été signées (), aucune vente d'Airbus (PA:AIR) n'a été annoncée lors des signatures de contrats mardi. Un "manque" presque réparé mercredi par Emmanuel Macron, qui a annoncé qu'une commande de 184 A320 serait bientôt finalisée.
Un protocole d'accord a été signé par Areva (PA:AREVA) et China National Nuclear Corp (CNNC) pour la construction d'une usine de traitement-recyclage du combustible nucléaire, un contrat géant qui reste lui aussi à concrétiser.
L'embargo chinois sur la viande bovine française devrait être totalement levé dans les six prochains mois et un déblocage est attendu pour le porc et le lait pour nourrissons.
Un travail est parallèlement engagé sur les services financiers.
Prié de dire pourquoi aucun montant global des accords n'était annoncé, Emmanuel Macron a répondu : "je ne souhaite pas donner le sentiment que cette visite est là pour venir chercher un maximum de contrats, avec un montant affiché très élevé".
Dans le passé, des chiffres ont été communiqués lors de rencontres de ce type qui se sont révélés fantaisistes, a-t-il souligné, "donc, plutôt que les chiffres, je préfère le suivi".
"Comment mesure-t-on un succès commercial ? Il n'y a pas de définition claire", s'interroge Jiang Shixue, de l'Institut des études européennes de l'Académie chinoise des sciences sociales, un think tank gouvernemental. "Globalement, il a obtenu de bons résultats."
"Je pense que l'objectif principal de la visite était de poser des nouvelles règles en termes de relation et de coopération économiques", déclare Jean-Pierre Cabestan, professeur de sciences politiques à l'Université baptiste de Hong Kong.
"La magie de la diplomatie est de masquer les désaccords profonds", ajoute-t-il, en soulignant que l'accès au marché chinois reste problématique. "Je pense qu'il voulait poser les bases d'une relation pour les cinq prochaines années."
Emmanuel Macron a annoncé qu'il se rendrait en Chine tous les ans.
(Jean-Baptiste Vey à Paris, Michel Rose, Kevin Yao et John Ruwitch à Pékin, édité par Yves Clarisse)