Le climat est-il en train de changer sur le marché obligataire européen ? Une chose est sûre, au vu des émissions bouclées ces derniers jours, les investisseurs se montrent plus exigeants pour prêter leur argent aux entreprises.
Après le break estival, la rentrée a également sonné sur le marché primaire européen. Et tandis que de nombreuses entreprises sont venues se financer la semaine passée, plusieurs d’entre elles ont fait les frais d’un changement d’humeur des investisseurs, changement qui se traduit manifestement par l’exigence d’une meilleure rémunération du risque.
Le cas de Jaguar Land Rover, et du semi-échec rencontré par son emprunt, est révélateur. Ainsi, mercredi dernier, le constructeur automobile haut de gamme britannique n’a pas été en mesure de récolter les 700 millions d’euros dont il avait besoin, devant se contenter de lever 500 millions d’euros.
En outre, il a dû proposer pour lever cette somme un rendement annuel de 4,50%, contre 4% annoncé initialement, ce qui l’a visiblement poussé à réduire sa levée de dette.
Autre exemple, l’émission bouclée 24 heures plus tard par VGP NV, le spécialise belge de l’immobilier semi-industriel, qui nous avait pourtant habitué lors de ses précédentes émissions à faire un carton plein. Il a lui aussi émis moins que prévu, soit 190 millions d’euros, alors qu’il avait indiqué vouloir placer entre 175 et 225 millions d’euros de nouvelles obligations.
Chose également inhabituelle, l’obligation fraichement émise, accessible par coupures de 1.000 euros, se traite sur le secondaire sous son prix d’émission.
Même topo pour la nouvelle obligation à sept ans du géant français de l’énergie Engie (ex - GDF Suez (PA:ENGIE)), disponible actuellement à un cours indicatif de 99% du nominal.
Hausse des « spreads »
Alors que les taux européens augmentent légèrement, le taux belge à dix ans avoisinant à nouveau les 0,8% par exemple, cette hausse des rendements s'expliquent avant tout par l'augmentation des spreads, c’est-à-dire une hausse des primes de risques que doivent payer les émetteurs par rapport aux taux considérés comme sûrs par le marché.
Illustration de cette tendance avec Saint Gobain (PA:SGOB), société industrielle qui vient de lever 500 millions d’euros à dix ans. Pour ce faire, la société française a dû proposer un rendement à l’émission de 1,94%, correspondant à une prime en regard des taux de référence du marché de 102 points de base.
Lors de son dernier emprunt sur une maturité similaire en mai de l’année dernière, ce spread s’élevait à 62 points de base.
Pourquoi ce changement de tendance ?
Signalons d’emblée que ce relatif changement d’humeur des investisseurs ne saurait être assimilé à un quelconque mouvement de panique.
A nos yeux, il traduit davantage la volonté des investisseurs d’être mieux rémunérés, dans un climat de politique monétaire qui sera bientôt moins accommodant.
D’ici à la fin de l’année, la Banque centrale européenne a pour rappel prévu de mettre un terme à ses rachats massifs de dettes d’entreprises et d’Etat.
Entré en vigueur il y a maintenant plus de trois ans, ce programme d'assouplissement quantitatif était destiné à relancer la croissance dans la zone euro, et de faire baisser les taux pour soutenir les crédits d’investissement.
Ce climat, appelé à être moins accommodant, modifie visiblement la perception des risques vis-à-vis des obligations d'entreprises, changement qui se reflète déjà dans les « spreads » comme évoqué ci-dessus.
Tout profit pour l'investisseur obligataire ?
Pour les investisseurs obligataires qui doivent vivre avec des taux désespérément bas depuis de nombreuses années, le fait que la politique monétaire de la BCE soit amenée à changer dans les prochaines mois pourrait signifier, enfin, une hausse des rendements.
Nous ne manquerons bien sûr pas de vous tenir informé sur Oblis de l’évolution du marché à cet égard.