Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Ayant succédé à la soirée d’Halloween, la journée du 1er novembre aura été un véritable conte de (bonne) fée. Et cette fois, impossible d’invoquer un flux de liquidité miracle : c’est bien l’actualité des dernières 48 heures sur les marchés qui a constitué un miracle et provoqué un feu d’artifices de records absolus, ce de part et d’autre de l’Atlantique.
Le CAC40 « GR » a ainsi grimpé jusqu’à 15.674,1 points en séance (le dixième de point est ici déterminant puisque l’indice avait culminé à 15.673,9 points la veille), alors qu’à New York le Nasdaq et le Nasdaq100 ont poussé jusqu’à respectivement 8 378 et 8 160 points (soit un gain hebdomadaire de 1,3% et de 28,65% à compter du 1er janvier pour ce dernier). Le S&P500 n’a pas non plus été en reste avec un gain de 1% vendredi et un plus haut à 3 067 points.
De son côté, le « VIX » a plongé de 7% vers 12,3, affichant un niveau qui traduit davantage que de la confiance : la conviction absolue qu’aucun risque de correction ne menace plus les marchés américains dans un avenir prévisible.
En effet, à l’exception notable de 2012 et surtout de 2018, toutes les fins d’années depuis 2009 se sont soldées par des hausses de +5% ou plus et il y a tout lieu de croire que la « règle » des 80% de périodes des fêtes favorables aux actions américaines se vérifiera à nouveau.
Alignement des planètes
Il n’y a en effet que du bon à l’horizon ! Le Secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross a par exemple affirmé vendredi qu’un accord commercial pourrait être signé à tout moment d’ici la mi-novembre et que la Chine pourrait accepter de respecter certaines exigences américaines sur la protection des brevets et de la propriété intellectuelle. Sur le front de la politique monétaire, la FED a de son côté réduit mercredi pour la troisième fois consécutive son taux directeur, arguant que la guerre commerciale sino-américaine engendre frilosité des entreprises et incertitude(s) sur la croissance.
Sauf qu’on a appris dès le lendemain – la Réserve fédérale le savait sûrement déjà – que le PIB américain avait remarquablement bien résisté avec une croissance de 1,9% au troisième trimestre (contre +1,6% anticipé). Le surlendemain, il est de surcroît apparu que l’économie américaine a créé 128 000 emplois non-agricoles en octobre, soit 48 000 de plus qu’attendu.
Mais le plus spectaculaire n’est pas là ! Wall Street a été littéralement ébloui par les révisions à la hausse des chiffres de septembre (de 136 000 à 180 000, soit +44 000) et d’août (de 168 000 à 219 000, soit +51 000). Cela fait donc 95 000 emplois « retrouvés » à la fin de l’été et presque 50 000 de plus que prévu en octobre.
Quant au taux de chômage, il s’établit à 3,6% et la grève chez General Motors (NYSE:GM) – avec des grévistes comptabilisés comme des demandeurs d’emplois – n’a eu aucun impact sur ce « score ». Enfin, en ce qui concerne l’inflation « trop basse », la hausse des prix hors alimentation et énergie (ou inflation « core », la principale référence pour la FED) s’établit à +2,2% et pourrait être considérée comme optimale.
Cet alignement de planètes ne semble toutefois même pas suffire à la sérénité des investisseurs et on peut s’attendre à ce que les marchés continuent de battre des records jusqu’à Thanksgiving, puis Noël, puis les élections américaines. Ce n’est que quand ils auront pris encore 25 à 30% de plus d’ici six à neuf mois (selon une simple perpétuation du rythme haussier de l’année en cours) qu’ils pourraient se mettre à corriger, ce qui serait fort dommageable puisque le CAC « GR » aurait atteint les 20 000 points, le Nasdaq les 11 000 points et le S&P500, pourquoi pas, les 4 000 points.
Face au risque presque inconcevable d’un repli des indices, de nombreux gérants et autres stratèges estiment que Christine Lagarde pourrait se rendre utile et profiter de l’occasion pour essayer autre chose, le marché ayant épuisé les joies des taux négatifs et des « QE-Infinity » mis en place par son prédécesseur à la tête de la BCE Mario Draghi.
Pourquoi ne pas se lancer dans des achats d’actions (ce qui lui est interdit), comme la Bank of Japan ou la MNS helvétique ? Ce faisant, il sera acquis que les actions ne pourront plus jamais rebaisser… un peu comme la production de céréales et d’acier du temps de Staline.
Les niveaux de valorisation affichés n’auraient définitivement plus aucune espèce de lien avec l’économie réelle et si les choses devaient mal tourner, c’est le contribuable qui renflouera le « système » d’une manière ou d’une autre…