Les rendements des bons du Trésor américain ont plongé mercredi, car la perspective que les républicains gardent le contrôle du Sénat, même si le président Donald Trump ne se fait pas réélire, a assombri l'espoir qu'un important plan de relance du Congrès.
Le rendement des bons du Trésor à 10 ans a plongé en dessous de 0,8 % après avoir atteint 0,892 % mardi, avant la publication des résultats des élections, et avoir brièvement dépassé 0,9 % en début de soirée.
Les investisseurs se sont précipités à nouveau sur les obligations d'État - les prix évoluent à l'inverse des rendements - alors que les espoirs de relance s'évanouissaient et que l'incertitude quant à l'issue de la course présidentielle les poussait à se mettre à l'abri.
Le rendement à 30 ans a dépassé 1,75 % mardi, mais a ensuite chuté de plus de 20 points de base mercredi, à moins de 1,55 %.
La course à la Maison-Blanche, qui opposait Trump au candidat démocrate Joe Biden, s'est soldée par des marges très étroites dans une poignée d'États de transition qui pourraient donner à l'un des candidats une majorité de 270 au Collège électoral.
Un certain nombre de sénateurs républicains considérés comme vulnérables ont réussi à repousser de fortes contestations, de sorte qu'il semble certain que le parti conservera une majorité au Sénat, et le contrôle de la législation qui s'y trouve, même si cette marge se réduit à 52 ou 51 contre 53 actuellement. Le leader de la majorité, Mitch McConnell, a été réélu dans le Kentucky, il conservera donc son poste lorsque le nouveau Congrès se réunira en janvier.
Un balayage démocratique de la présidence et des deux chambres du Congrès ne s'est toutefois pas concrétisé, car les républicains semblent également prêts à gagner des sièges à la Chambre des Représentants, même si les démocrates gardent le contrôle. Le trading dit de la "vague bleue" basé sur ce balayage s'est effondré mercredi et explique une grande partie de l'action dans les obligations du Trésor.
En plus de réduire les espoirs de relance budgétaire, un gouvernement divisé bloquerait probablement les 2 000 milliards de dollars de dépenses en énergie verte proposés par M. Biden, même s'il gagne la présidence. Pendant ce temps, les actions ont connu une forte hausse, le Sénat contrôlé par les républicains n'ayant pas prévu de nouvelles taxes ni de taxe sur le carbone.
Une longue lutte pour la présidence pourrait faire grimper les prix des obligations du Trésor et faire baisser les rendements. La campagne Trump réclame déjà un recomptage dans le Wisconsin, où Biden semble avoir gagné avec une marge de moins de 1 %, et saisit la justice pour arrêter le comptage des bulletins de vote dans le Michigan et la Pennsylvanie jusqu'à ce que les observateurs républicains y aient accès. Le président a laissé entendre que le vote pourrait se retrouver devant la Cour suprême, comme ce fut le cas lors de l'élection contestée de 2000.
Ce genre d'incertitude maintient les investisseurs sur la sellette et les incite à se réfugier dans les obligations du Trésor.
En attendant, les investisseurs surveillent également les performances économiques, car ils craignent qu'une résurgence de la pandémie de COVID-19 en Europe et la possibilité de nouvelles restrictions aux États-Unis n'aient un impact sur les données économiques et sur la lenteur de la croissance. Le rapport publié la semaine dernière, selon lequel le PIB du troisième trimestre a augmenté à un taux annuel de 33 %, a fait naître l'espoir d'un rebond de l'économie américaine.
Les responsables politiques de la Réserve Fédérale devront faire face à la perspective d'une moindre relance. Les appels du président de la Fed, Jerome Powell, à une aide fiscale généreuse sont tombés dans l'oreille d'un sourd au Sénat républicain, laissant à la banque centrale le soin de faire face au ralentissement de l'économie par le biais de la politique monétaire. C'est une autre perspective qui pousse à la baisse les rendements des obligations d'État.