Publié à l'origine sur Proposutiles.com
Pour un certain nombre d’économistes, la baisse tendancielle des taux d’intérêt depuis le début des années 1980 n’est pas, ou du moins pas seulement, liée à la politique de plus en plus laxiste des banques centrales. Selon eux, un phénomène démographique, ayant conduit à un excès d’épargne, est en effet à prendre en compte. Concrètement, la proportion de personnes âgées entre 35 et 64 ans a été historiquement haute dans les pays riches au cours des trois dernières décennies. Or, cette tranche d’âge étant celle où la capacité et l’envie d’épargner sont les plus élevées, les flux financiers en quête de placements auraient mécaniquement progressé au point d’alimenter un long marché « haussier » sur les obligations et a fortiori une décrue sans fin des taux d’intérêt (rappelons que ces derniers évoluent dans le sens inverse des prix des emprunts). Cette théorie a notamment été mise en avant en 2005 par Ben Bernanke, alors Président de la Réserve fédérale américaine.
Pourquoi donc l’évoquer aujourd’hui ? Tout simplement parce que la démographie, au cœur de ce raisonnement, est en train de basculer. L’accélération du vieillissement de la population des pays les plus riches va en effet dépeupler les tranches d’âges qui épargnent le plus pour faire grossir celles les moins en mesure d’économiser. La rupture sera majeure à partir de 2020. Si la théorie est juste, cela signifie que le marché obligataire va donc se retourner pour s’engager sur la voie d’un long chemin « baissier », tel un miroir des trente dernières années. Nous assisterions alors à une remontée des taux d’intérêt nominaux et réels. Celle-ci aurait deux grandes conséquences : elle fragiliserait les ménages, les entreprises et les Etats endettés (suivez notre regard...) et conduirait, toutes choses égales par ailleurs, à une décrue des ratios de valorisation utilisés pour les actifs financiers et immobiliers. Le manque d’épargne constituera-t-il un handicap pour l’économie mondiale ? Nous serons fixés dans quelques années.