Avis de mauvais temps sur les devises des pays émergents comme la livre turque, le peso argentin ou le real brésilien, toutes en perte de vitesse face au billet vert. Les investisseurs ont décidé de vendre massivement leurs positions pour se recentrer sur des actifs libellés en dollar, une monnaie désormais plus rémunératrice pour un risque jugé moins élevé.
A l’origine de ces dégagements : la remontée des rendements obligataires américains sur fond d’amélioration de la croissance économique et de l’inflation aux États-Unis et l'amorce d'un changement des politiques monétaires des grandes banques centrales, singulièrement celle de la Réserve fédérale américaine (Fed).
Embarquée dans un mouvement de resserrement monétaire, la Fed a conforté le sentiment des investisseurs à l'égard du dollar en relevant le 13 juin, son principal taux d'intérêt directeur de 25 points de base (0,25%), pour la seconde fois cette année. Les taux naviguent désormais dans la fourchette de 1,75% à 2%, « un niveau accommodant qui soutient ainsi de bonnes conditions du marché du travail et un retour vers une inflation de 2% », a précisé le Comité monétaire de la Fed (FOMC) dans son communiqué.
La Réserve fédérale, dont c'est la septième hausse depuis la sortie de la politique monétaire à taux zéro fin 2015, prévoit de nouvelles hausses de taux d'ici la fin de l'année, deux précisément. La Fed est également plus optimiste pour son économie. Dans ses prévisions, elle table sur une croissance de 2,8% en 2018, soit 0,1% de plus que prévu en mars, et de 2,4% (inchangée) en 2019.
Dans ce contexte, favorable à un rebond du dollar, les devises émergentes, déjà fragilisées, ont encore accusé le coup. À des degrés divers cependant puisque des facteurs internes entrent aussi en ligne de compte. La remontée de la devise américaine pénalise par exemple avant tout les pays émergents les plus fortement endettés en dollar, puisque la charge de leur dette en est mécaniquement augmentée.
Pour la banque Société Générale (PA:SOGN), citée par le quotidien français Les Échos, le real brésilien et la livre turque sont les devises les plus vulnérables alors que le rand sud-africain, le zloty polonais et la couronne tchèque pourraient mieux résister.
Quant au peso argentin, la Banque centrale de la République d’Argentine (BCRA) semble bien en peine de stopper la descente aux enfers qui touche sa devise. Malgré un taux d’intérêt directeur remonté en urgence de 27,25% à 40% (en réaction à la crise du peso démarrée fin avril), la perspective d’un plan d’aide du FMI de 50 milliards de dollars et le remplacement du président de la BCRA, Federico Sturzenegger, par le ministre des Finances Luis Caputo, une décision du président argentin Mauricio Macri, la pression ne faiblit pas sur la monnaie argentine.
Faut-il pour autant ne plus investir dans les pays émergents ? Pas nécessairement. Certains gestionnaires restent positifs pour l’Argentine, par exemple, jugeant attrayants les rendements offerts par les obligations souveraines arrivant à échéance au début de l’année prochaine, alors que le pays est désormais soutenu par le FMI.