Si l’OPEP réussit à s’entendre quant à la réduction de la production, la Russie prendra-t-elle part au marché? On doute de la capacité des membres de l’OPEP à conclure un accord, mais il est certain que, sans la participation de la Russie, les chances de réduire le surplus de production sont nulles. En dépit des propos de Poutine, les investisseurs devraient être prudents vis-à-vis des intentions de la Russie quant à sa participation –d’une forme ou d’une autre -, à un gel de la production.
Poutine a déclaré lors du Congrès Mondial de l’Energie à Istanbul, que « la Russie est prête à participer à des mesures communes de réduction de la production ». Toutefois, Poutine (et d’autres leaders des pays producteurs de pétrole) est connu pour faire des annonces en vue de causer des mouvements spéculatifs sur les cours de l'or noir indépendamment de leurs intentions actuelles. Plus tard dans la journée, le PDG de Rosneft (MCX:ROSN), Igor Sechin, a déclaré devant le même auditoire que son groupe, le plus grand producteur de pétrole russe, ne réduirait pas sa production. Plus tard encore, un porte-parole de Rosneft est revenu sur ces commentaires, affirmant que dans l’éventualité où l’OPEP et la Russie atteignaient un accord, Rosneft s’y soumettrait. Bien entendu, Rosneft ne peut contredire Poutine, qui dirige la Russie d’une main de fer, mais la première déclaration de Sechin indique qu’il ne considère un accord que comme une lointaine possibilité. En public, les producteurs de pétrole russes soutiennent le gouvernement en faveur d’une réduction de la production, mais en interne, la question est loin d'être claire.
Entre temps, l’Arabie Saoudite et la Russie ont annoncé la tenue d’une réunion le 22 et 23 octobre. Lors de la dernière rencontre (en marge d’une conférence du G20) entre le ministre de l’énergie Russe Novak, et le ministre de l’énergie d’Arabie Saoudite, Al-Falih, des rumeurs selon lesquelles cette conversation déboucheraient sur un gel de la production du pétrole avaient fait bondir les prix de 4%. Cette fois-ci, les investisseurs ne devraient pas être aussi naïfs. Présentée comme faisant partie d’un accord sur la coopération technologique, l’Arabie Saoudite devrait présenter (ou intimider la Russie avec) ses installations de pointe. Ne vous attendez à absolument aucune négociation concernant la production durant cette réunion.
Le mouvement de marché le plus récent de la Russie devrait donner des indications sur ses futurs plans. Rosneft a récemment pris part à un accord avec Trafigura pour l’acquisition du géant indien Essar Oil. L’acquisition devrait doter Rosneft d’un réseau de distribution majeur pour son brut sur un marché indien émergent. Cet accord indique que Rosneft commence à imiter la stratégie de diversification d’Aramco.
Au cours des cinq ou dix dernières années, Aramco a fait des acquisitions stratégiques de raffineries et de points de distribution en Chine, Corée et en Amérique, afin de garantir la distribution de son propre pétrole brut. En effet, en février, Aramco envisageait une offre sur 49% des parts d’Essar Oil. L’acquisition de Rosneft indique que la compagnie prévoit d’augmenter sa production de brut et recherche activement de nouveaux clients et de nouveaux marchés.
L’histoire même de la Russie nous procure d’importants indices. En 2008 et 2009, l’Arabie Saoudite avait convaincu la Russie de réduire sa production de pétrole en même temps que les pays de l’OPEP. Malgré l’accord de la Russie, Igor Sechin de Rosneft ne s’y était pas plié. Si l’Arabie Saoudite est sceptique face aux intentions de la Russie, les investisseurs devraient également l’être.