Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Les dernières bribes d’optimisme alimentées par Wall Street vendredi (qui affichait un repli d’à peine 1% à 30 minutes de la clôture, alors que les places européennes avaient rechuté de -4,2%) se sont évanouies à l’issue de la demi-heure de cotations à Wall Street.
Les indices américains ont subi une rafale de ventes algorithmiques qui les a ramenés au contact de leurs plus mauvais niveaux du début de séance, à parité avec les places européennes (avec des écarts s’étageant entre -3,5% et -4,1%).
Difficile de déterminer s’il s’agissait de ventes de précaution, ou de “fait accompli” après que Trump ait annoncé avoir signé le “stimulus package” (ou “Coronavirus-Bill“) de 2 000 Mds$.
Sur la semaine écoulée, le Dow Jones a engrangé +12,85% (c’est la performance hebdomadaire la plus spectaculaire depuis 1938), le S&P500 +12,2%, le Nasdaq +9%.
Malgré ces écarts époustouflants, nous observons avec inquiétude que le VIX ne s’est absolument pas détendu sur la semaine écoulée, et il a bien failli en terminer à 69 contre 66 le vendredi 20 mars.
En sus de la volatilité qui ne se résorbe pas, voilà que survient ce weekend la rechute de -6,5% du pétrole sous 20$ (nouveau plancher testé brièvement à 19,9$ sur le WTI) en parallèle avec un fléchissement inattendu du dollar, le “Dollar Index” subit en repli de plus de -1% (à 98,3).
Les écarts les plus sévères ont été observés durant 2 séances consécutivement sur la paire $/£ (le “câble”) avec -2%, coup sur coup de 1,203 vers 1,246.
Le dollar dégringole face au yen
Mais le plus inquiétant, c’est la chute de -1,7% du dollar face au yen vers 107,8 : cela pourrait être le signe annonciateur d’un débouclage des “carry trade“, c’est à dire que des opérateurs désespérant de réaliser des plus-values sur des actifs libellés en dollar liquident leurs positions constituées grâce à des emprunts libellés en yen… qu’ils vendent à découvert pour acquérir du dollar, et plus précisément des T-Bonds qui s’avéraient encore très rémunérateurs il y a à peine 1 mois (1,28% le 28 février contre moins de la moitié aujourd’hui sur le “10 ans” américain (0,66% en ce début de semaine).
Le yen a gagné pas moins de +4% face au dollar la semaine dernière : il est revenu au contact des 105, au plus bas depuis le 8 mars.
Si les investisseurs commencent à délaisser les T-Bonds américains, c’est une très mauvaise nouvelle pour la FED et la Maison Blanche : le refinancement des déficits pourrait devenir problématique et la monétisation de la dette, à la japonaise, risque d’affecter négativement la confiance dans le billet vert alors que la FED a déjà promis l’injection de 6.000Mds dans le cadre de son soutien “no limit” aux divers acteurs de l’économie réelle.
Une économie réelle qui commence à passer en mode alerte rouge avec l’indicateur de confiance des consommateurs du Michigan du mois de mars qui dévisse de 101 vers 89,1, alors que l’enquête a été réalisée avant le “lockdown” et reflétait déjà la plus forte dégradation jamais observée depuis octobre 2008.
La prochaine enquête “U-Mich” attendue mi-avril pourrait être encore plus funeste.
Les investisseurs ont toutes les raisons de douter d’un redémarrage rapide de l’économie comme le souhaite Donald Trump : le bilan des victimes s’alourdit spectaculairement à New York et commence à se rapprocher des chiffres effroyables constatés en Italie depuis mercredi dernier avec près de 1.000 décès, et le nombre de personnes contaminées aux Etats unis dépasse le total officiellement publié par la Chine au plus fort de l’épidémie.
Donald Trump est le chef d’Etat occidental qui s’est enferré le plus longtemps dans le déni du risque de pandémie et qui a le plus tardé à mettre en œuvre les mesures de détection et de confinement des personnes contaminées.
Cela coûte très cher à Wall Street, et cela pourrait coûter encore plus cher politiquement à Donald Trump.