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Payer les creux… ? mais il n’y a pas de creux !

Publié le 14/05/2018 14:38
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Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr

Après le « volatgeddon » de début février, la plupart des gérants sont restés sur la défensive durant 6 semaines et les rares audacieux se sont retrouvés groggy le 26 mars avec la rechute du CAC40 au contact des 5 000 points. Décidément, ça ne payait plus de « payer les creux ».

L’horizon géopolitique s’assombrissait de jour en jour avec la multiplication des tweets de Donald Trump fustigeant l’accord sur le nucléaire iranien, prélude à son enterrement acté sans surprise mais avec force grincements de dents en Europe depuis le 8 mai.

Le risque d’escalade entre l’Iran et Israël semblait inévitable, et dès le 9 mai, un nouveau palier de tension était franchi sur le théâtre d’opération syrien, sous le regard attentif de Moscou (soucieux d’éviter la confrontation avec Israël) et de Washington (soucieux d’éviter la confrontation avec Moscou).

Qui pouvait alors justifier de manifester un regain d’appétit pour le risque ?

Qui trouvait judicieux de « payer les creux » fin mars ?

Comme la réponse « personne » semble assez logique, les sherpas (les banques centrales qui administrent ouvertement le prix des actifs financiers + les titans planétaires de la gestion d’actifs qui rament dans le même sens) ont décidé tout aussi logiquement de supprimer les creux (puisque personne n’en profite).

Ainsi, depuis le 28 mars, il n’y a plus eu aucun creux à payer, aucune consolidation supérieure à -0,6% et de plus de 48h.

▶ Les marchés restent sur leurs sommets

Le CAC, le Dax ou l’EuroStoxx600 affichent tous les trois une septième semaine consécutive de hausse : une grande première depuis l’entame de l’année 2015, le rallye de l’époque étant porté par la mise en place du Quantitative Easing de la BCE. Cette énième hausse funiculaire pouvait être initialement interprétée comme une forme de revanche de l’Eurozone sur Wall Street. Mais plus certainement encore, nous y avons vu l’effet mécanique positif d’une remontée du dollar de 1,255 vers 1,2 face à l’euro. Un incontestable handicap pour Wall Street, mais qui a été surmonté au bout d’à peine un mois : alors que le billet vert poursuivait sa hausse à 1,185 euro, le S&P500 a enchainé un 5 sur 5 à la hausse et aligne même 8 séances de gain consécutives.

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Dans le même temps, le volet géopolitique a été totalement digéré (occulté) : les investisseurs expliquent qu’ils se focalisent sur la bonne surprise que constitue une progression modérée de l’inflation. Ils font le pari qu’il va en être ainsi pour les mois (les trimestres) à venir, alors que le prix de l’or noir flambe et que le prix de l’essence à la pompe a pris 25% en quelques mois.

▶ Pas d’inflation hors pétrole

Cette hausse des carburants outre-Atlantique a d’ores et déjà carbonisé les maigres économies fiscales réalisées fin 2017 par les ménages américains à faibles revenus. Mais pour Wall Street, ce qui compte, c’est le niveau de l’inflation « core » (hors énergie) et en ce domaine, les chiffres publiés le 10 mai sont très rassurants : les prix des biens et services ont littéralement stagné aux Etats-Unis – et même légèrement reculé au mois d’avril. Cela signifie aussi que beaucoup d’entreprises subissent des contraintes sur leurs marges : l’ogre Amazon (NASDAQ:AMZN) est largement responsable de l’instauration d’un environnement déflationniste permanent, grâce à des montages fiscaux qui lui procurent un avantage concurrentiel décisif dans le domaine de la distribution et que Donald Trump dénonce avec de plus en plus de véhémence.

C’est ainsi que Wall Street parvient à réconcilier hausse de l’énergie et perspective non inflationniste : les investisseurs peuvent donc profiter sans restriction de la hausse des valeurs de l’énergie. Les pétrolières européennes pulvérisent semaine après semaine des records annuels et même, désormais, historiques. Les valeurs du secteur Energie (Oil & Gas) ont grimpé de 21% depuis début février.

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Enfin, le plus puissant carburant pour les marchés U.S continue d’être injecté en « mode turbo » : il s’agit des annonces de rachats de titres (« buybacks »).

▶ Inflation de rachat de titres

Elles déferlent par dizaines de milliards certains jours, et même centaines de milliards de dollars (Apple (NASDAQ:AAPL)), conformément aux anticipations du second semestre 2017 : le produit de l’amnistie fiscale de Donald Trump (sur les capitaux soustraits à l’impôt fédéral) étant majoritairement redistribué par les entreprises aux actionnaires, et non aux salarié sous forme de hausse de salaires comme cela avait été « vendu » par les membres du Congrès à l’opinion publique pour faire passer la pilule d’un somptueux cadeau destiné aux ultra-riches. Et comme ils ne trouvent nulle part où réinvestir autant de liquidités (le marché de l’or, c’est bien trop étroit, et l’argent, c’est carrément anecdotique), ils le laissent là où il est, c’est-à-dire dans le cœur du réacteur nucléaire, dont la température affiche 24 850° (sur le Dow Jones) ou 14 320° (sur le CAC40 Global Return, le vendredi 11 mai, nouveau record absolu). Ils n’ont aucune raison de s’inquiéter : Warren Buffett vient d’affirmer que ces valeurs, certes historiquement élevées, demeurent « sans doute raisonnables ».

Pour notre part, après 7 semaines de hausse ininterrompue, il nous paraît surtout raisonnable d’en douter.

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