Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Luckin Coffee (basé à Pékin) s’est lancé en octobre 2017 sur le créneau du café haut de gamme en Chine et a ouvert 4 500 points de vente en 24 mois (dépassant Starbucks (NASDAQ:SBUX) avec ses 3 600 boutiques), revendiquant une croissance de +700% du chiffre d’affaires sur les neuf premiers mois de l’année 2019.
Le titre faisait une entrée triomphale (via une IPO et la levée de 500 M$) il y a un an jour pour jour (le 16 mai 2019) à Wall Street (une semaine après Uber (NYSE:UBER)) et sa valorisation initiale de 4,5 Mds$ avait atteint plus de 11 Mds$ mi-janvier dernier.
Starbucks n’avait qu’à bien se tenir : le géant américain voyait se dresser sur sa route un nouveau titan à tête de cerf, affichant une ambition à l’échelle de son milliard et demi de clientèle potentielle, et les tarifs pratiqués pour une qualité sensiblement égale sont de 15 à 17% inférieurs à Starbucks.
Une particularité: les gobelets bleus ont une taille unique, de 33 cl environ… pas le choix, mais moins de frais : standardisation totale. Moins de pâtisseries et de mignardises dans les points de vente et l’accent mis sur des moyens de paiement sans contact ou par “applis” ultrarapides et la précommande : on descend de son bureau, on récupère un plateau avec les gobelets, c’est déjà payé, pas d’attente… c’est un peu le contraire d’une vraie pause café dans un lieu qui invite à profiter du moment.
Tout cela diffusait un agréable parfum de success story -si la qualité était demeurée égale à celle des origines- mais le rêve des actionnaires a volé en éclats -tout comme le cours qui s’est désintégré de -80% le 1er avril après la révélation d’une fraude comptable massive destinée à gonfler le chiffre des ventes -pour rassurer les créanciers- au plus haut niveau de la direction.
Le titre qui a reçu un avis de radiation de la SEC a sombré de plus de 68% supplémentaires depuis la reprise des cotations le 20 mai, à 1,39$, soit moins de 350 M$ de capitalisation.
La survie de l’enseigne, très endettée, semble compromise.
C’est certainement le scandale boursier le plus spectaculaire depuis la compagnie d’exploitation forestière bidon Rain Forest.
Baidu (NASDAQ:BIDU) sera t-il le prochain sur la liste ?
Le géant de l’internet Baidu songe à se faire dé-lister du Nasdaq, estimant que sa cotation à New York est devenue un obstacle à une valorisation correcte : en réalité, Baidu souffre de la concurrence de ByteDance, le concepteur de l’appli Tik-Tok qui le prive d’une partie de sa clientèle la plus jeune, tout en demeurant incontournable comme moteur de recherche.
Un titre chinois continue de tenir la route : le spécialiste des cours en ligne TAL Education… mais résistera t-il aux demandes de transparence totale renforcées des autorités boursières américaines ?