par Alastair Macdonald
BRUXELLES (Reuters) - L'Etat islamique (EI) va probablement tenter de commettre de nouveaux attentats en Europe, prévient vendredi Europol, l'agence de police de l'Union européenne, selon laquelle des dizaines de djihadistes seraient déjà sur le sol européen et de nombreux autres susceptibles d'y venir en raison du recul de l'EI en Irak et en Syrie.
Quelque 2.500 Européens pourraient lutter encore dans les rangs de Daech au Proche-Orient, estime de son côté le coordinateur antiterroriste de l'UE Gilles de Kerchove dans un entretien accordé à Reuters. Le haut fonctionnaire compare le retour de ces combattants à l'afflux d'activistes chevronnés après le retrait soviétique d'Afghanistan en 1989.
"Ils pourraient essayer de revenir chez eux et nous ne voulons pas répéter l'erreur que nous avons faite à la fin des années 1980, quand les Russes ont quitté l'Afghanistan et que nous avons laissé ces moudjahidine (...) dans la nature", dit-il. Nombre de ces anciens d'Afghanistan ont combattu lors de la guerre civile des années 1990 en Algérie ou dans d'autres conflits comme en Tchétchénie, au Yémen ou au Kosovo.
"Le califat physique (...) est en train de s'effondrer mais le califat virtuel est toujours là, ce qui permet à l'organisation de diriger des attaques", souligne Gille de Kerchove.
Dans un rapport consacré à la menace que fait peser l'EI sur l'UE, Europol souligne que le groupe djihadiste peut recourir à de multiples formes d'attentats, qu'il s'agisse d'attaques simultanées comme celles qui ont ensanglanté Paris et Bruxelles ou d'initiatives de "loups solitaires".
Mais l'agence de police européenne dit aussi s'attendre à ce que les djihadistes cherchent à importer en Europe les attentats à la voiture piégée et les enlèvements, communs en Syrie et en Irak.
L'ARME D'INTERNET
Europol pense que l'EI va continuer à infiltrer les groupes de réfugiés syriens pour attiser les tensions au sein de l'UE, qui fragilisent déjà de nombreux gouvernements.
"Si l'EI est défait ou sérieusement affaibli en Syrie/Irak par les forces de la coalition, il pourrait y avoir une accélération du taux de retour des combattants étrangers et de leurs familles vers l'UE ou d'autres zones de conflit", souligne l'agence dans un communiqué.
Gilles de Kerchove déclare pour sa part que les services de sécurité doivent être prêts à déjouer dans les années à venir des cyberattaques ou des attaques à l'arme biologique.
"Jusqu'à présent, les organisations terroristes n'ont pas utilisé internet comme une arme", constate le juriste, en mentionnant le risque de cyberattaques contre les centrales nucléaires, les barrages hydroélectriques, les réseaux électriques ou même les systèmes de contrôle du trafic aérien.
"Je n'exclus pas que nous soyons confrontés à cela avant cinq ans", prédit-il.
En poste depuis 2007, Gilles de Kerchove souligne cependant qu'au cours des deux dernières années, la coopération entre Etats membres en matière de renseignement a fait un bond en avant "impressionnant".
"Nous avons pratiquement comblé la plupart des lacunes", assure-t-il.
Le renforcement des mesures de sécurité et de la coopération entre polices européennes a permis de déjouer un certain nombre de projets d'attentat ces deux dernières années, souligne quant à lui le directeur d'Europol, Rob Wainwright, tout en notant que "la menace reste élevée" et qu'elle ne pourra être efficacement repoussée que par "une coopération encore meilleure".
(Tangi Salaün et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)