PARIS (Reuters) - La nouvelle donne créée par la décision de Donald Trump de retirer son pays de l'accord sur le nucléaire iranien souligne le besoin pour l'Europe de renforcer son autonomie stratégique vis-à-vis des Etats-Unis, a déclaré jeudi Jean-Yves Le Drian.
Selon le ministre français des Affaires étrangères, les pays européens devront se montrer "très unis et très solidaires sur les choix" dans la période qui s'ouvre, marquée par les échanges de tirs entre Israël et forces iraniennes stationnées en Syrie.
"Les événements qui se produisent en ce moment donnent la preuve de cette nécessité", a-t-il déclaré sur BFM TV.
Le chef de la diplomatie française a fait là écho à des déclarations d'Angela Merkel, pour qui "l'Europe en est toujours à ses balbutiements en matière de politique étrangère commune".
"Et c'est une nécessité existentielle de faire des progrès dans cette voie parce que les conflits ont complètement changé de nature depuis la fin de la Guerre Froide", a déclaré la chancelière allemande lors d'un discours prononcé à Aix-la-Chapelle, en présence d'Emmanuel Macron.
Partant du constat que l'alliance avec les Etats-Unis n'avait plus valeur d'assurance tous risques, elle a insisté sur l'impératif pour les Européens de "prendre leur destin en main". "C'est la tâche à accomplir dans le futur."
Angela Merkel "met le doigt sur une réalité, c'est la nécessité pour l'Europe d'avoir son autonomie stratégique", lui a indirectement répondu Jean-Yves le Drian.
"Cela a beaucoup bougé dans ce domaine-là depuis quelques mois. La prise de conscience (...) de la nécessité pour les Européens d'avoir leur capacité de décision stratégique est devenue essentielle et que l'Allemagne le dise est encore un élément supplémentaire", a-t-il poursuivi.
L'autonomie stratégique des Européens, a-t-il ajouté, ne vaut pas rupture avec les Etats-Unis, mais "veut dire que l'on peut avoir à l'intérieur de cette alliance une autonomie d'action".
La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont déploré d'une même voix, mardi, la décision de Donald Trump de se dégager de l'accord conclu en 2015 par l'Iran et plusieurs grandes puissances, après des années de tractations diplomatiques autour du programme nucléaire de la république islamique.
A l'inverse, Israël et l'Arabie saoudite ont salué le choix américain.
Les relations délétères entre Israël et l'Iran se sont encore envenimées dans la nuit de mercredi à jeudi à la suite de tirs de roquettes des forces iraniennes sur le plateau du Golan.
L'armée israélienne a répliqué en lançant des missiles contre des infrastructures iraniennes en Syrie dans le cadre de son offensive la plus importante depuis le début du conflit syrien, il y a sept ans.
(Simon Carraud, édité par Jean-Philippe Lefief)