Une Allemagne à la traîne sur ses objectifs climatiques inaugure mardi, en présence de la chancelière Angela Merkel, le parc éolien d'Arkona en mer Baltique, censé aider le pays et l'Europe à hâter la transition énergétique.
Voici trois choses à savoir sur le sujet.
- "Multiprise" -
A mi-chemin entre la Suède et l'Allemagne, alignées au large de la pastorale île allemande de Rügen, les 60 gigantesques éoliennes du parc d'Arkona ont été installées l'année dernière en un temps record de trois mois.
Le parc a une capacité de 385 mégawatts, assez pour alimenter 400.000 ménages.
L'énergéticien français Engie a signé un contrat d'achat d'électricité de quatre ans avec OWP Arkona, une coentreprise de l'allemand Eon et du norvégien Equinor.
La France a fourni via Engie la station sous-marine d'Arkona, assemblée sur les chantiers de l'Atlantique (STX) de Saint-Nazaire. Les ouvriers avaient baptisé cette station et ses labyrinthiques 150 km de câbles "la multiprise", selon la presse.
Le parc est déjà en service depuis des mois, mais cette cérémonie norvégo-allemande prévue sous le soleil de Pâques offre aux dirigeants de ces pays, à un mois des élections européennes, un décor pour leurs discours respectifs sur l'Europe de la transition écologique.
- Virage ou mirage -
"Pour limiter les conséquences du changement climatique, dont on parle beaucoup, nous avons besoin d'un changement complet et fiable de notre système énergétique", a plaidé la chancelière, voyant dans Arkona un "exemple concret" du virage énergétique allemand.
Ce "virage énergétique" (Energiewende), l'Allemagne s'en est faite la pionnière à travers la décision choc prise en 2011 de sortir du nucléaire, suite à la catastrophe de Fukushima.
Mais huit ans plus tard, la première économie européenne en est loin. L'Allemagne se chauffe et s'éclaire principalement au très polluant charbon (houille et lignite), dont elle espère néanmoins sortir d'ici 2038.
Les énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque, biogaz...) représentent aujourd'hui 38% du mix énergétique allemand et doivent atteindre 65% en 2030. Sur ce volet, l'Allemagne tient sa feuille de route.
Mais côté réduction des émissions polluantes, Berlin a en revanche dû constater son retard critique. Le gouvernement a revu l'année dernière à la baisse ses prévisions de réduction d'ici 2020, tablant désormais sur une baisse de 32% de ses émissions de gaz à effet de serre en 2020 (par rapport à 1990) contre 40% auparavant.
"Atteindre nos objectifs climatiques d'ici 2030, va nous demander beaucoup de travail", a reconnu Angela Merkel, rappelant que les énergies vertes ne représentaient qu’un aspect du problème, à côté des transports et de la mise aux normes des bâtiments.
- L'éolien marin à la rescousse -
L'Allemagne avait inauguré ses premières éoliennes marines il y a dix ans, dans un scepticisme généralisé.
A l'époque les experts redoutaient des coûts d'exploitation trop élevés. Et les débuts de l'éolien offshore ont en plus été marqués par une série noire: avaries, tempêtes, turbines coulées...
Aujourd'hui, les coûts ont été réduits et un cinquième de l'énergie éolienne allemande est produite en mer.
Environ 1.300 éoliennes d'une capacité de 6,4 gigawatts tournent dans la vingtaine de parcs de la mer du Nord et Baltique.
Berlin a en revanche décidé de réduire progressivement ses ambitieuses subventions à l'éolien terrestre, dont l'acheminement de l'électricité au consommateur reste chère et qui est mal vu dans les communautés voisines des turbines.
L'éolien en mer rencontre moins d'opposition que sur terre auprès de l'opinion publique. Pas de bruit, pas de tours plantées dans le jardin du voisin et pas d'oiseaux tués dans les champs.
Toutefois, les associations environnementales alertent sur des risques spécifiques de ces turbines installées en mer: les fréquentes collisions d'oiseaux sur les pales et le bruit des turbines, considéré comme infernal pour certains mammifères, comme les marsouins.